Ils sont une grosse poignée de marchands collectionneurs, tous passionnés de mobilier des années 1950, qu’il soit signé Prouvé, Perriand, Jeanneret, Le Corbusier ou Royère. Ce sont eux, aux côtés de Jean-Claude Kraftchik et Alane Grisot, qui ont largement contribué à sauver de l’oubli et à ramener sur le devant de la scène, dans le courant des années 1980, ces créations alors oubliées. Portraits de Philippe Jousse, Patrick Seguin, François Laffanour et Éric Touchaleaume, pionniers du style 1950.
François Laffanour
Sur les pas de Jean Prouvé
Pourquoi avoir choisi le métier d’antiquaire ? “C’était un hasard. J’avais fait des études d’histoire mais ne souhaitais pas enseigner. Rien ne me prédisposait à exercer cette profession.” Cet accident d’orientation l’amène aux Puces où il prend un stand en 1978. Là, séduit par le travail de Prouvé, il commence à vendre des meubles des années 1950. La dimension intellectuelle de ces créations et l’idéal social du maître nancéien le séduisent. “J’aime ces meubles qui ménagent un pont entre l’architecture et l’art, ces objets atypiques et honnêtes habités d’une sorte de poésie. Ils sont nés de la nécessité de faire des pièces belles et peu coûteuses pour répondre aux commandes de collectivités. Les créations de la seconde moitié du XXe siècle constituent une révolution dans l’histoire du mobilier avec l’utilisation de nouveaux matériaux et de nouvelles technologies.” Rapidement, il prend goût à ce métier synonyme, pour lui, de découvertes et de remises en question et aux rencontres avec une clientèle très tournée vers l’art contemporain. Il quitte les Puces pour la rue de Provence et ouvre à la fin des années 1970 la première galerie proposant des objets de style 1950 à Paris, avant de s’installer rue de Seine en 1980. “Je suis très présent dans ma galerie car je veux privilégier le contact avec les collectionneurs. Je veux que mon espace soit un lieu de rencontre.” Le premier, il organise des expositions présentant successivement les créations de Royère, Matégot, Prouvé et Perriand. “Je ne pourrais pas vivre sans œuvres d’art autour de moi. Elles constituent une nourriture de l’âme extraordinaire, un moyen de rompre avec la solitude et une tentation de se dépasser.”
Éric Touchaleaume
Archéologue du XXe siècle
Éric Touchaleaume, quarante-cinq ans, n’aime rien tant que voyager et découvrir. Marchand spécialisé dans le mobilier d’architecte, il se veut archéologue du XXe siècle. Il aime avant tout sauver des objets et les éclairer d’un regard nouveau. Il a passé une bonne partie des deux dernières années entre l’Inde et l’Afrique.
“J’ai sillonné l’Afrique noire en 4 x 4 pendant toute l’année dernière accompagné d’un confrère marseillais, Gérald Moreau, et d’une équipe d’une quarantaine de personnes (démonteurs, ingénieur, chef de chantier... et gardes du corps). Nous sommes partis sur les traces de Jean Prouvé, de Côte d’Ivoire au Niger en passant par la Guinée et le Gabon.” Leur objectif ? Rapatrier de grandes maisons tropicales en aluminium construites par Prouvé à Niamey (1949) et Brazzaville (1952) qu’il exposera au printemps prochain en région parisienne aux côtés de meubles de Prouvé et Perriand. Autodidacte, Éric Touchaleaume, a abandonné ses études à l’âge de dix-sept ans pour monter un atelier de restauration de Harley-Davidson avant d’ouvrir, en 1976, une boutique aux Puces de Saint-Ouen où il vend des meubles du XXe siècle et de la peinture des XIXe et XXe siècles.
Sa rencontre avec Prouvé se fait en 1984, année où il rachète avec le concours de François Laffanour, son associé pendant quatre ans, un lot de 600 chaises du créateur nancéien. En 1987, il consacre une exposition au maître de l’aluminium avant de vendre en 1990 tout son stock à Philippe Jousse et Patrick Seguin et partir “se mettre au vert à Mougins” où il poursuit une activité de courtier en peinture et sculpture moderne. Il effectue son retour à Paris en 1999 en ouvrant une galerie au 54 rue Mazarine, en association avec Jean-Pierre Bouchard. Là, ils exposent en permanence des meubles de Prouvé, Perriand, Jeanneret, Le Corbusier, des bois de Noll, des luminaires de Mouille et des photographies de Lucien Hervé.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Les pionniers du mobilier des années 50 (part II)
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°134 du 12 octobre 2001, avec le titre suivant : Les pionniers du mobilier des années 50 (part II)