Tableaux anciens, sculptures, objets d’art et d’archéologie : les marchands dévoilent sur Tefaf des œuvres rares de toutes les époques et dans toutes les techniques. Notre sélection
Un félin bien modelé
Chat en bronze, Égypte, 3e période intermédiaire, 26e dynastie, 600 av. J.-C., hauteur : 13,3 cm, Galerie Rupert Wace Ancient Art Limited, Londres.
Ce chat en bronze, représentation animale de la déesse Bastet, est l’un des joyaux artistiques de l’ancienne Égypte présentés sur Tefaf 2007. Depuis leur domestication au Moyen Empire (vers 1 800 av. J.-C.), les chats ont toujours été estimés en Égypte, que ce soit comme animal de compagnie, comme prédateurs d’animaux nuisibles ou encore pour leur grande fécondité. Ce félin bien modelé, aux lignes pures et élégantes, correspond à l’image archétypale du chat dans l’art de l’ancienne Égypte. Il est représenté assis avec la queue soigneusement enroulée autour des pattes. Sa tête fixe droit devant. Ses larges oreilles pointues, percées pour des boucles d’oreilles, sont incisées de lignes imitant la plume de Maat, déesse de la Vérité et de la Justice. Une amulette figurant l’œil d’Horus pend à son large collier gravé et un scarabée est incisé sur sa tête en référence au dieu du soleil Rê, son père. Cette statuette qui a appartenu à la célèbre collection Joseph Ternbach avant d’être acquise par un amateur américain en 1968, est proposée à 120 000 euros.
Un tapir millénaire
Zun, récipient à vin en forme de tapir, bronze incrusté d’or et de turquoise, Chine, période
des Royaumes combattants, IV-IIIe siècle av. J.-C., hauteur : 26,5 cm, longueur : 42,5 cm, Galerie Littleton & Hennessy, Londres et New York.
Annoncé comme le bronze archaïque le plus cher jamais apparu sur le marché, au prix affiché de 12 millions de dollars (9,23 millions d’euros), ce tapir de 2 500 ans a miraculeusement survécu à une période mouvementée de l’histoire de la Chine ancienne, celle des Royaumes combattants. Cet objet incarnant une créature qui a disparu en Chine il y a environ 10 000 années, est un récipient à vin appelé zun. Grâce à l’anneau qui se trouve sur son dos, il est possible d’enlever le couvercle pour le remplir de vin à déverser par la bouche de l’animal. On sait que les dirigeants chinois collectionnaient des animaux exotiques rares comme le tapir, issu de Malaisie. Ce mammifère semble porter un collier ornemental et il s’agissait probablement d’un animal de compagnie royal. C’est l’un des deux seuls bronzes parés d’incrustations aussi riches dont on ait connaissance, l’autre se trouvant dans un musée à Taiwan. Celui-ci faisait partie d’une collection privée suisse pendant les années 1920 et a été exposé à Berlin en 1929. Il fait une apparition remarquée à Tefaf.
Christ rhéno-mosan
Christ en Croix, bois de noyer, ateliers rhéno-mosans, vers 1 200, hauteur : 48 cm, galerie Bresset & Fils, Paris.
Ce Christ est un rare témoignage conservé de la sculpture en bois de la fin du XIIe siècle de cette région entre le Rhin et la Meuse qui recouvre les diocèses de Cologne et de Liège. « C’est une région particulièrement distinguée à l’époque romane dans les arts du métal, en orfèvrerie et bronze ; la richesse de l’église impériale depuis les Carolingiens et les Ottoniens en fit un centre remarquable de création artistique », indique l’antiquaire Gilles Bresset. Cette statuette présente un rare exemple de la transition du modèle roman vers le premier type gothique perceptible ici dans le périzonium (pagne) couvrant un seul genou dans un drapé aux plis asymétriques.
Son visage allongé est saisissant par son expression de calme et de sérénité à l’égal de certains bouddhas antiques. Son état de conservation est remarquable pour un objet en bois de cet âge. Et parce qu’il est de la qualité que peut attendre un grand musée, son prix tourne autour de 130 000 euros.
Un nautile d’Augsbourg
Nautile monté en argent et vermeil, Augsbourg, vers 1620-1625, par Ulrich I Ment, hauteur : 34 cm, longueur : 20 cm, galerie Kugel, Paris.
Si la mode des objets naturels transformés en pièces d’apparat, tels les œufs d’Autruche et les noix de coco enchâssés d’or ou d’argent, date du XVe siècle, le nautile, gros coquillage nacré en forme de conque, n’apparaît guère avant la fin du XVIIe siècle, et ce, à Augsbourg et Nuremberg dans un premier temps. Pour cet exemplaire de grande qualité, la terminaison de l’hélice est sculptée en ajour d’un heaume surmonté d’un aigle bicéphale, motif encadré par des rinceaux en vermeil formant un cartouche. Le pied bombé et le fût de forme balustre, tous deux de section octogonale, sont constitués de moulures en vermeil alternant avec des résilles en argent formées de volutes ornées de fleurs en relief. Les quatre montants enserrant le nautile sont formés de sirènes ailées. Le couvercle amovible et bombé est également composé de résilles en argent ornées de volutes de fleurs en relief avec une bordure en vermeil ciselée d’une frise de palmettes dans des cartouches alternant avec une fleur ; il est coiffé d’une figure de Fortuna sur un globe ailé. Le bord du pied ainsi que l’intérieur du couvercle sont marqués aux poinçons de la ville d’Augsbourg et du maître-orfèvre Ulrich I Ment. C’est un objet rare et prisé dont le prix entre dans la catégorie des nombres à six chiffres.
Un chef- d’œuvre du peintre Luttichuys
Nature morte à la carafe d’étain, Simon Luttichuys, huile sur toile signée et datée S.L. fecit/1649, 78 x 64,1 cm, galerie French & Company, New York.
Cette nature morte est une peinture majeure dans l’œuvre du peintre hollandais Luttichuys. Elle confirme une hypothèse émise par Laurens Bol, selon laquelle l’artiste hollandais, né en 1610 à Londres, a passé une grande partie de sa carrière dans la sphère d’influence de Jan Jansz. den Uyl et Jan Jansz. Treck à Amsterdam. Cette peinture est clairement la réminiscence de l’œuvre des deux peintres, à la fois par la palette réduite à un nombre limité de couleurs déclinées dans de subtiles variations ainsi que par l’utilisation d’un motif central, la carafe d’étain. Ce tableau provient d’une collection privée suédoise et a été présenté en 1967 au Musée national de Stockholm à l’occasion d’une exposition sur les maîtres hollandais. Il est apparu pour la première fois sur le marché le 5 juillet 2006 chez Sotheby’s qui l’a vendu pour 825 600 livres (1,2 million d’euros), un record pour l’artiste. Pour cette rare et exceptionnelle peinture, conservée dans son cadre d’origine du XVIIe siècle en ébène, l’antiquaire demande 4 millions de dollars (3 millions d’euros).
Asperges, prunes et fraises des bois
Nature morte à la botte d’asperges, au pot en terre cuite de fraises des bois, aux groseilles à maquereau et prunes sur un entablement en pierre, signée et datée A. Coorte, 1703, huile sur papier marouflée sur toile, 36,8 x 43,5 cm, galerie Haboldt & Co, Paris.
Si les natures mortes d’Adriaen Coorte sont réputées, c’est d’abord pour la grande sobriété de leur composition. Le peintre hollandais originaire de Middelburg limite volontairement le nombre d’éléments qu’il place le plus simplement possible dans son tableau, parfois jusqu’à un certain minimalisme et ce, en contradiction avec la mode baroque de l’époque où les fruits et fleurs figurent à profusion. Ses natures mortes sont généralement présentées sur un support de pierre, se détachant d’un fond sombre, éclairées par une lumière venant de la gauche. À l’exemple de cette peinture, Coorte incluait souvent des fraises des bois dans ses compositions les plus élaborées, présentées dans une coupe en terre cuite d’où sortait une fleur blanche. La botte d’asperges est aussi un motif de prédilection de Coorte : cette plante potagère apparaît dans pas moins de treize tableaux de l’artiste. 1 450 000 euros est le prix demandé pour cette œuvre très proche d’une autre peinture signée et datée 1690, conservée au Musée de Dordrechts, en Hollande.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Les objets phares de Maastricht
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°254 du 2 mars 2007, avec le titre suivant : Les objets phares de Maastricht