Les métiers d’art organisent leur « speed dating »

Europe. En France on n’a pas (ou peu) de champions du numérique, mais on a des milliers d’artisans d’art qui continuent à pratiquer le tissage, la fabrication de costumes, l’émaillage, l’ébénisterie, la forge de couteaux, le tannage de cuir… Selon un arrêté officiel, sont dénombrés très exactement 198 métiers d’art. Mais comme pour tous les métiers manuels, le secteur peine à recruter par manque de jeunes formés. Et pourtant, il n’y a pas que le numérique qui offre des débouchés professionnels, l’industrie du luxe, la restauration des monuments historiques, le design ont besoin de bras pour assurer la relève.

C’est pour cela que l’Institut national des métiers d’art (qui a récemment changé de nom au profit de celui d’« Institut pour les savoir-faire français ») organise chaque année depuis dix-huit ans les Journées européennes des métiers d’art. Cette année, la manifestation se déroule du 2 au 7 avril dans toute la France. Le principe est simple : inciter le public, et notamment les jeunes, à aller dans les ateliers afin de leur faire découvrir des métiers moins médiatisés que celui des influenceurs sur Facebook et TikTok, mais certainement plus rémunérateurs et plus accessibles.

Les jeunes peuvent ainsi rencontrer des apprentis chaudronniers scolarisés au lycée professionnel Henri-Sainte-Claire Deville à Issoire (Puy-de-Dôme) qui exposent des objets confectionnés pendant leur formation, une forgeronne de Vic-Fezensac (Gers) qui ouvre son atelier de fabrication de couteaux, ou Hervé Brunelle, l’un des derniers artisans embauchoiristes d’Europe qui fabrique des petites pièces permettant le façonnage et le maintien de la forme de bottes et souliers. La plupart de ces visites sont libres, ce qui n’est pas le cas des « Rendez-vous d’exception » où il faut s’inscrire au préalable. Ces lieux d’exception sont en général des entreprises ou des ateliers comptant un nombre plus important d’artisans. Par exemple, l’entreprise D’Ennery confection en Haute-Loire (labellisée « Entreprise du patrimoine vivant »), spécialisée dans le matelassage à façon pour les professionnels de l’ameublement, ou l’Opéra national de Lorraine à Nancy qui ouvre son atelier costumes. Les cavaliers peuvent aussi discuter avec des selliers et charrons de l’Institut national du cheval et de l’équitation dans le Gard.

Conscient de l’enjeu économique d’un secteur qui, en 2019, regroupait 150 000 professionnels pour un chiffre d’affaires total de 19 milliards d’euros, le ministère de la Culture a présenté en mai 2023 un vaste plan visant à valoriser les métiers d’art auprès des jeunes, soutenir la recherche et aider les artisans à exporter. Des mécènes privés veillent aussi soigneusement sur ces artisans, telle la Fondation Bettencourt-Schueller qui distingue chaque année des professionnels particulièrement créatifs.