WASHINGTON / ÉTATS-UNIS
Le Yémen, en proie à une terrible guerre civile, préfère que ces objets restent en lieu sûr aux États-Unis.
Les États-Unis avaient décidé de restituer 77 objets pillés au Yémen ; mais alors que ce pays reste déchiré par la guerre, le Musée national d'art asiatique du Smithsonian (Washington) a accepté de les conserver pendant au moins deux ans, dans le cadre d'un accord entre les deux pays. Parmi les 77 objets figurent un bol en bronze, 11 manuscrits coraniques et 65 stèles funéraires datées de la seconde moitié du premier millénaire avant J.-C., provenant du nord-ouest du Yémen.
Conformément à l’accord, certains des objets pourraient être exposés au musée, notamment au sein de l'exposition « Yémen antique : encens, art et commerce ». Le gouvernement du Yémen aura la possibilité de prolonger le partenariat au bout des deux ans, en fonction de la situation dans le pays. L'ambassadeur du Yémen aux États-Unis, Mohammed Al-Hadhrami, a déclaré dans un communiqué qu’« avec la situation actuelle au Yémen, ce n'est pas le bon moment pour ramener ces objets dans le pays », ajoutant que le Musée national d'art asiatique du Smithsonian est un « leader mondial dans le domaine du patrimoine culturel et de la préservation. Nous sommes heureux de voir ces objets sous leur garde ».
Le ministère américain de la justice a indiqué que 64 des stèles avaient été confisquées par les autorités dans le cadre d'une enquête sur Mousa Khouli, un marchand condamné pour contrebande, qui vendait les objets pillés dans sa boutique new-yorkaise Windsor Antiques. Les 13 autres objets ont été saisis alors qu'ils étaient introduits clandestinement aux États-Unis, a indiqué le Smithsonian dans un communiqué de presse. Les stèles de pierre concernées seraient entrées clandestinement aux États-Unis via les Émirats arabes unis il y a plus de dix ans. Les agents fédéraux ont ensuite saisi des correspondances et des factures relatifs à ces objets, contenant de multiples incohérences, au domicile et dans la galerie de Mousa Khouli. En 2012, l'antiquaire, qui se faisait également appeler Morris Khouli, a plaidé coupable de contrebande d'objets égyptiens et de fausse déclaration. Il a été condamné à un an de probation, six mois d'assignation à résidence et 200 heures de travaux d'intérêt général, selon le New York Times.
D'autres objets saisis dans le cadre de cette enquête ont été restitués à l'Égypte en 2015. Mais l’initiative de cette semaine est une première depuis 20 ans, la dernière restitution par les États-Unis d'objets culturels au Yémen étant une unique stèle funéraire remise en 2004.
La guerre au Yémen, qui oppose les Houthis, des rebelles chiites soutenus par l'Iran, à une coalition dirigée par l'Arabie saoudite, a compliqué le processus de rapatriement. Le pays connaît depuis le début de la guerre civile en 2014 de nombreux pillages et destructions de son patrimoine culturel matériel, ainsi qu’une grave crise humanitaire - 20 millions de personnes, soit 80 % de la population, sont confrontées aux attaques militaires, aux famines, aux maladies et à la pauvreté.
Le partenariat est donc une alternative au rapatriement direct, le musée qualifiant l'accord de « modèle exemplaire dans la façon dont les musées américains peuvent travailler avec d'autres pays pour gérer les objets culturels et les partager avec de larges publics ». L'ambassade du Yémen conseillera l’institution sur les questions de recherche et de conservation pendant que les objets resteront à Washington.
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Le Smithsonian va temporairement héberger des objets restitués au Yémen
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