En une guerre cérébrale, Calculs meurtriers (présenté hors compétition à Cannes) oppose une forte femme flic à deux ados auteurs, pour la gloire et l’ivresse d’une liberté absolue, d’un meurtre gratuit et néanmoins parfait. Jeu d’échecs, match des intelligences tactiques, dangereuse surenchère des machinations : depuis trente ans, Barbet Schroeder enclenche et bloque le même verrou fritz-langien de la mise en scène comme manifestation mais surtout piège de la puissance. Ce qui signe la défaite des deux minets importés de l’actuel teenage movie ? Autant l’extrême finesse de la grise Sandra Bullock, que trois faiblesses internes : un orgueil infini d’enfant gâté ; une secrète envie d’être pris, pour enfin s’éprouver normal, « humain » ; une perverse rivalité de petits coqs, dont l’aiguillon s’affole à mesure que les choses s’enveniment. Bien sûr, cette chute aux mécanismes multiples est orchestrée par le metteur en scène Schroeder, cinéphile formé à l’école française, grand stratège, horloger très exact. Mais se découvre alors, dans cet inégal rapport de deux maîtrises, la contradiction peut-être cynique dont il a toujours été captif. « Dans la vie », Schroeder rejette in fine la mise en scène comme vanité fatale. La pratique la loue pourtant, « en art », comme discipline suprême. Diabolique enclos de la fascination. Le spectateur y fait pendant 118 minutes la toupie, sans vertige mais avec plaisir.
- Calculs meurtriers (Murder by numbers), de Barbet Schroeder. Avec Sandra Bullock, Ryan Gosling, Michael Pitt. Sortie le 5 juin.
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Le nouveau Barbet Schroeder
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°537 du 1 juin 2002, avec le titre suivant : Le nouveau Barbet Schroeder