Malgré les polémiques, le ministre de la Culture a signé un contrat trentenaire.
ABOU DHABI - Le 6 mars, le ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, accompagné d’une délégation française composée de directeurs de musées parmi lesquels Henri Loyrette, le président-directeur du Musée du Louvre, et de Francine Mariani-Ducray, directrice des Musées de France, a signé à Abou Dhabi (Émirats arabes unis) l’accord pour le lancement du Louvre-Abou Dhabi. Il s’agit d’ailleurs davantage d’un contrat-cadre, les choses semblant loin d’être figées. Une pédagogie à double sens doit encore se mettre en place. La précipitation de cette signature s’explique en partie par la proximité de l’élection présidentielle, la polémique suscitée en France et le risque pour les Émiratis de devoir reprendre à zéro les négociations avec un nouveau gouvernement.
L’accord vise à créer à Abou Dhabi un musée universel, de l’Antiquité à l’art contemporain, avec pour objectif de mettre « en valeur le dialogue entre les civilisations dans le domaine des arts ». Signé pour une période de trente ans, il impose deux obligations majeures à la France : une aide logistique pour la conception et la gestion du musée, et le prêt d’œuvres avant que l’établissement se constitue son propre fonds. Les pièces de la collection – trois cents dans un premier temps – proviendront de musées de France ; une proportion raisonnable d’entre elles – un chiffre de 15 % à 30 % a été murmuré – seront issues du Louvre lui-même. Les prêts seront consentis pour une durée de six mois à deux ans, « éventuellement renouvelable », ce qui porte leur longueur maximum à quatre ans.
Les Français s’engagent aussi à organiser des expositions temporaires pendant quinze ans à partir de l’ouverture du musée, prévue en 2012.
Enfin, le nom « Louvre » est concédé pour une période de trente ans, renouvelable. L’ensemble de l’opération sera piloté par la future « Agence internationale des musées de France ». En échange, Abou Dhabi versera un milliard d’euros, dont 400 millions pour le seul nom « Louvre », 190 millions d’euros pour les prêts d’œuvres de la collection permanente, 195 millions d’euros (hors assurances) pour les expositions temporaires et 165 millions d’euros pour l’agence. En marge de cet accord, les Émirats ont annoncé diverses actions de mécénat, en faveur du Louvre à Paris (25 millions d’euros) ainsi que du petit théâtre du château de Fontainebleau. Un étage du pavillon de Flore au Louvre, le théâtre et un centre de restauration en projet (lire ci-dessous) porteront en remerciements les noms de personnalités émiraties.
Quid de la sécurité des pièces dans une enclave, certes libérale, mais nichée au cœur d’une poudrière ? « Si on regarde l’histoire récente, les Émirats ont montré une grande capacité à se protéger contre tous les phénomènes de terrorisme », a souligné Cheikh Sultan ben Tahnoun Al-Nahyane, signataire de l’accord. Sur place, les œuvres seront insaisissables. Si la France estime que les pièces courent un risque, elle pourra les rapatrier immédiatement. Pour éviter que le projet ne soit que l’importation d’un savoir-faire occidental, les autorités devront intégrer les acteurs locaux au projet. « Nous serons vigilants en regardant comment le Louvre et le Guggenheim vont observer la réalité locale, nous a confié Omar Saif Ghobash, vice-président d’Emirates Foundation. Nous allons voir ce que ces grands projets vont nous proposer, et faire de notre côté des contre-propositions ou des compléments. »
Quoi qu’il en soit, l’opération en est encore à ses prémices. D’autres millions vont encore couler pour constituer les collections du musée. Après le Qatar et le Koweit, qui avaient fait les belles heures des ventes d’art islamique, un nouvel acteur du Moyen-Orient va sûrement booster le marché de l’art dans son ensemble.
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Le Louvre s’installe aux Émirats
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°255 du 16 mars 2007, avec le titre suivant : Le Louvre s’installe aux Émirats