Restitution

Le fragment du retable sera rendu gracieusement

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 19 novembre 2007 - 483 mots

L’antiquaire flamand qui avait retrouvé un élément du retable de l’église de Vétheuil volé en 1973 a tenté de le négocier au prix fort.

PARIS - L’affaire a consterné plusieurs marchands internationaux parmi lesquels Christian Deydier, président du Syndicat national des antiquaires (SNA), qui n’est pas étranger à son heureux dénouement. En effet, dans un communiqué du 9 novembre, le SNA a annoncé la restitution à la France d’un fragment d’un retable du XVIe siècle relatant La Passion du Christ et provenant de l’église Notre-Dame de Vétheuil (Val-d’Oise). Cette pièce avait été volée en 1973 et se trouvait en possession d’un marchand flamand. Bernard Descheemaeker, antiquaire d’Anvers spécialisé en objets de haute époque, qui avait acheté en toute bonne foi ce fragment figurant Le Baiser de Judas, s’est rendu compte en effectuant des recherches, qu’il s’agissait d’un bien volé. Bien que désireux de le rendre à la commune de Vétheuil, il en a d’abord voulu un prix très soutenu : pas moins de 185 000 euros, soit six fois le montant qu’il avait déboursé pour l’acquérir. La mairie de Vétheuil lui en a proposé 40 000 euros, dont la moitié payée par l’État. Mais le Flamand n’en démordait pas. Après deux mois de blocage, et dans un mouvement de solidarité spontané, plusieurs antiquaires se sont offusqués du comportement « éthiquement inacceptable » de leur confrère, qui plus est membre du SNA et comptant parmi ses clients les musées français. Finalement, Christian Deydier, assisté du commandant Bernard Darties, chef adjoint de l’OCBC (Office central de lutte contre le trafic des biens culturels), a dénoué la situation en convainquant l’antiquaire de faire don de l’œuvre à Vétheuil en conformité avec « la moralité et les règles du syndicat », souligne le président du SNA. Ajoutant : « Bernard Descheemaeker était dans son droit lorsqu’il en demandait une somme d’argent. Et cette affaire nous permet de remettre en avant les disparités européennes. En Belgique, par exemple, les professionnels ne sont pas dans l’obligation de tenir un livre de police qui permet une traçabilité des œuvres comme en France. Les voleurs et receleurs le savent bien. » « Juridiquement, nous étions coincés, reconnaît le commandant Darties. La restitution a pu se faire parce que la réputation générale des marchands était en jeu. » Il existe une directive européenne « Restitution » qui s’applique aux trésors nationaux volés (1), sortis du territoire national depuis 1993 et retrouvés dans un autre pays membre de l’Union européenne. Or si la partie de retable a bien été retrouvée en Belgique, son vol datant de 1973, elle ne pouvait tomber sous le coup de cette directive. « Il faut aller plus loin et revoir les cadres juridiques au niveau mondial, insiste Bernard Darties. Nous préconisons un accord bilatéral entre l’Europe et les États-Unis, calqué sur le modèle de la directive “Restitution”, car beaucoup d’objets finissent dans des collections américaines. »

(1) pour la France, elle concerne les objets inscrits et classés ; les archives publiques et les biens conservés dans les musées nationaux.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°269 du 16 novembre 2007, avec le titre suivant : Le fragment du retable sera rendu gracieusement

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