Dans son rapport, le Conseil des impôts estime que l’on ne peut pas dissocier la question de l’imposition des œuvres d’art de la taxation générale du patrimoine. Dans ce sens et sous le titre “La concurrence fiscale, une donnée à ne pas sous-estimer”?, il a tenté une analyse comparative de la situation en Europe.
PARIS. Le Conseil justifie son analyse en observant que “entre pays, une forme de concurrence fiscale […] peut s’exercer, amenant les agents à préférer détenir certains actifs à l’étranger” et que “cette forme de concurrence fiscale internationale risque d’être d’autant plus marquée que les actifs concernés sont facilement délocalisables”. Le rapport analyse tout d’abord l’évolution depuis trente ans des impôts sur le patrimoine suivant les définitions et les chiffres de l’OCDE. Cette fiscalité “rassemble les impôts périodiques et non périodiques sur l’utilisation, la propriété ou la mutation des biens, frappant des personnes physiques comme les personnes morales”. Sur cette définition – qui n’est pas “toujours suivie scrupuleusement” par les États –, en 1995 les impôts sur le patrimoine représentaient en moyenne 4,2 % des prélèvements obligatoires dans l’OCDE, la France étant à 5,2 %, l’Italie à 5,7 %, l’Allemagne à 2,8 %, les Pays-Bas à 4 % et le Royaume-Uni à 10,5 %. Le cas britannique s’explique par une plus grande place de ces impôts dans son système fiscal. Le rapport le rapproche de ceux des États-Unis, du Canada et de Nouvelle-Zélande, États qui frappent peu les transactions mais imposent la propriété immobilière.
Impôt supprimé en Allemagne
Rapportées aux PIB nationaux, les disparités sont moindres : France 2,3 %, Allemagne 1,1 %, Italie 2,3 %, Pays-Bas 1,8 %, et Royaume-Uni 3,7 %. Dans les trente dernières années, les évolutions ont été divergentes : diminution au Royaume-Uni, en Allemagne et en Italie, constante aux Pays-Bas, croissante en France. Dans la part de la taxation, à l’exception de l’Italie, le rapport constate que les impôts périodiques sur la propriété immobilière sont de loin les plus importants : de 87 % au Royaume-Uni à 50,3 % en France, et entre 35 et 45 % en Allemagne et Pays-Bas. Parmi les autres impositions, celles sur les successions et donations sont sensiblement plus élevées en France et aux Pays-Bas (15,7 et 15,3 %) qu’en Allemagne (9,5 %), au Royaume-Uni (5,6 %) et en Italie (2,7 %). Les impôts périodiques sur l’actif net (dont l’ISF) vont de 0 % (Royaume-Uni) à 36,4 % (Allemagne) et 15,2 % (France) ; ils touchent plutôt les entreprises, la part des ménages n’étant que de 9,3 % en Allemagne et de 4,8 % en France. Au passage, le rapport rappelle que l’Allemagne a supprimé l’impôt sur la fortune en 1997. L’Italie, mais également la Belgique, la Grèce, l’Autriche, le Portugal et l’Espagne taxent plus lourdement les transactions (41,6 % en Italie). Le rapport estime que le poids global des prélèvements reste assez faible dans les différents États. Le mode de prélèvement qui permet une plus ou moins grande fluidité des transactions lui paraît plus important. Pour affiner cette approche, le Conseil des impôts a choisi l’analyse de cas-types, pour mesurer sur une longue période (50 ans) la pression fiscale sur le patrimoine des ménages. En agrégeant les différentes taxes et en les actualisant suivant leur date de perception, pour les rapprocher de la valeur du patrimoine et de ses revenus actualisés en fin de période, le rapport a défini un “indicateur de pression fiscale” pour cinq États européens et pour différentes catégories de ménages (avec des patrimoines allant de 650 000 à 40 millions de francs). Le rapport observe que les tranches allant de 2,5 à 10 millions de francs “apparaissent cinq fois plus imposées aux Pays-Bas et quatre fois plus imposées en France qu’en Allemagne ou au Royaume-Uni”. Si les disparités sont fortes, on comprend que le poids somme toute modeste des impôts sur le patrimoine, et leur large assise immobilière, n’en font pas encore un critère premier dans les choix des contribuables. Le rapport observe cependant que “la France ne fait pas partie des pays qui imposent le moins le patrimoine et utilise aujourd’hui, contrairement à d’autres pays, tous les vecteurs d’imposition”. Peut-être une manière élégante de dire qu’il y a des choix à faire.
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La France dans le peloton de tête
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°64 du 8 juillet 1998, avec le titre suivant : La France dans le peloton de tête