Tandis que la Fondation Krupp réaffirme son engagement dans le mécénat d’art avec l’exposition \"Pieter Bruegel le Jeune et Jan Bruegel de Velours\", la famille de l’industriel nazi s’engage dans une bataille juridique pour reprendre son contrôle.
ESSEN. Depuis 1953, le Kulturstiftung Ruhr (fondation pour les arts) organise tous les deux ans une grande exposition dans la Villa Hügel, à Essen. Les subventions proviennent de la Fondation Alfried Krupp von Bohlen und Halbach et – pour une petite part – de la vente des billets d’entrée, des catalogues et des produits dérivés. L’an passé, le Kulturstiftung Ruhr a ainsi reçu 1,5 million de marks (5 millions de francs français) de la Fondation, qui fait aujourd’hui l’objet d’une bataille juridique menée par les descendants d’Alfried Krupp. Jugé à Nuremberg, Alfried Krupp avait été condamné à douze ans de prison pour avoir fait travailler 70 000 déportés comme main-d’œuvre esclave, à Auschwitz et ailleurs. Il fut cependant libéré dès 1951. La Fondation fut créée après sa mort, en 1967, son fils Arndt ayant décidé de renoncer à l’héritage en contrepartie d’une rente annuelle – décision interprétée par certains comme une habile façon d’estomper le passé nazi de l’industriel. La Fondation reçut alors toutes les parts de la société Krupp, géant de l’industrie lourde allemande enrichi par la fabrication d’armes. Bien que le gouvernement iranien ait plus tard acquis un intérêt minoritaire dans la Fondation, elle possède toujours 51 % des parts, dont les revenus servent aux actions de bienfaisance et de mécénat. Depuis 1968, la Fondation a déboursé un total de 465 millions de marks (1,5 milliard de francs). Et l’année dernière, 47 millions sont allés à des œuvres de bienfaisance, dont 4 millions au secteur culturel. L’organisme est toujours dirigé par le professeur Berthold Beitz, nommé fondé de pouvoir par Alfried Krupp en 1953 et aujourd’hui âgé de 84 ans. Lorsqu’il prendra sa retraite, le dernier lien avec la dynastie Krupp disparaîtra et la Fondation passera en des mains totalement étrangères. Cinquante membres de la famille d’Alfried Krupp se sont rassemblés pour tenter de prendre le contrôle de la Fondation. Diana Maria Friz, nièce de l’industriel et porte-parole du conseil de famille, insiste sur l’aspect purement symbolique et traditionnel de l’enjeu : “Si notre bataille juridique aboutit, nous n’en tirerons aucun bénéfice financier”. Elle souhaite que les dépenses de bienfaisance soient contrôlées par des membres de la famille et non par des étrangers.
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La famille Krupp repart en guerre
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°46 du 24 octobre 1997, avec le titre suivant : La famille Krupp repart en guerre