Avec la création d’une Fondation nationale pour l’art et la culture, Julian Nida-Rümelin, le ministre de la Culture allemand entend centraliser le financement du secteur culturel. Dans un entretien, ce dernier précise ses intentions sur un projet d’ores et déjà mal perçu par les États fédéraux, auparavant seuls compétents dans ce domaine.
BERLIN (de notre correspondante) - Depuis que Berlin est redevenue la capitale de l’Allemagne, la perception de l’identité culturelle semble avoir changé outre-Rhin. Jusqu’à présent, les affaires culturelles étaient déléguées aux seize Länder (régions). Adoptée après-guerre, la politique de décentralisation empêchait tout programme culturel national. Philosophe âgé de quarante-six ans, Julian Nida-Rümelin – aujourd’hui ministre allemand de la Culture et de la Presse – vient pourtant d’obtenir 25 millions de deutschemarks (83,8 millions de francs) pour l’exercice financier 2002 afin de créer une nouvelle organisation centrale pour la culture et les arts. Il espère que ce budget triplera au cours des prochaines années. Son prédécesseur au ministère, Michael Naumann, avait déjà proposé la création d’une telle structure, relançant ainsi une idée née dans les années 1970. Avec un budget de 1,86 milliard de deutschemarks (6,2 milliards de francs), le ministère de la Culture et de la Presse est le plus modeste du gouvernement. Le pouvoir et les initiatives de Julian Nida-Rümelin dépendent, en grande partie, du bon vouloir du chancelier Gerhard Schröder. Cette situation est d’autant plus fragile que son projet est largement critiqué par les autorités régionales dont les fondations culturelles des États seront à terme chapeautées par un organisme national. Elles procéderont à l’acquisition d’œuvres d’art et au financement d’institutions locales, mais leur budget sera établi au niveau national. “L’Allemagne a autant besoin d’un ministre de la Culture que l’Autriche d’un ministre de la Marine”, a déclaré le ministre bavarois des Arts, Hans Zehetmair. Certains craignent que l’Allemagne, qui voit de toutes parts fleurir des institutions et des initiatives culturelles, ait à pâtir d’une politique centralisée. Promoteur de l’art contemporain, du théâtre et du cinéma, Julian Nida-Rümelin nous précise ses intentions.
Comment s’appellera la nouvelle Fondation nationale pour la culture ? Bundeskulturstiftung (Fondation fédérale pour la culture) ou Nationalstiftung für Kunst und Kultur (Fondation nationale pour l’art et la culture) ?
Nous ne savons pas encore : cela dépendra de la décision des régions. Nous essayons de créer une Bundeskulturstiftung qui opérera en parallèle avec la Kulturstiftung des États régionaux. Nous aimerions réunir les deux fondations en une seule qui porterait le nom de Nationalstiftung. S’il n’est pas possible de le faire, il y aura une Bundeskulturstiftung et une Kulturstiftung dans les régions, avec des points d’intersection entre les deux. Cela n’empêcherait pas plus tard une fusion des deux entités.
Vous avez déclaré que la Nationalstiftung aurait pour vocation de promouvoir “l’art contemporain dans un contexte international”.
L’art contemporain doit devenir l’une des principales préoccupations de la Nationalstiftung. Pas seulement l’art contemporain en Allemagne, mais aussi, d’un point de vue plus international, des projets artistiques réalisés avec d’autres pays. L’intérêt de l’art contemporain réside en partie dans ces coopérations. Nous aimerions émettre un signal, montrer que, pour nous, promouvoir l’art contemporain dans un contexte international est un devoir national.
Plus précisément, pour l’art contemporain, une aide matérielle est-elle envisagée ? La Nationalstiftung réalisera-t-elle des acquisitions d’œuvres d’art ?
Les arrangements financiers en collaboration avec d’autres pays sont prévus. Nous espérons également développer une politique d’acquisitions dès que les différentes Kulturstiftungen des Länder nous auront rejoints. Mais pour cela nous aurons besoin d’un véritable soutien national. Je pense que l’absence de politique culturelle nationale a freiné la création. La Bundeskulturstiftung nous ouvrira un champ d’action plus étendu et se concentrera exclusivement sur le financement des projets. Elle englobera la politique culturelle des régions, en confiant au gouvernement fédéral la tâche spécifique de l’organisation des échanges culturels internationaux. Mais la Stiftung n’aura pas la charge de veiller au financement des institutions, ni d’acquérir des œuvres d’art ; l’idée est qu’elle sera uniquement responsable du financement des projets.
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Julian Nida-Rümelin - Effort de concentration
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°132 du 14 septembre 2001, avec le titre suivant : Julian Nida-Rümelin - Effort de concentration