Avec l’ouverture de la Roumanie, Bucarest a révélé cinq œuvres de Camille Claudel, dont deux inédites. Deux d’entre elles sont dans les collections du Musée national d’art de la ville et trois autres en mains privées, héritage d’un médecin ayant étudié à Paris au début du siècle. Connues depuis 1996 par les auteurs du catalogue raisonné de l’artiste, les œuvres devront attendre sa nouvelle édition pour y figurer. Mais deux de ces sculptures ont déjà disparu.
PARIS - Lorsqu’il rentre à Bucarest, en 1901, le docteur Alexandre Slatineanu n’oublie pas d’emporter quelques souvenirs de ses années d’études parisiennes à l’Institut Pasteur : un Buste de Rodin en bronze commandé par le Mercure de France et fondu vers 1898, un plâtre de La Valse (vers 1893), un Nu de femme accroupie en plâtre, ainsi qu’une statuette en plâtre intitulée Le Sculpteur Rodin, tous de Camille Claudel. Les quatre sculptures suivent le médecin dans ses demeures successives, jusqu’à sa mort, et sont conservées dans leur intégralité par ses héritiers jusqu’en 1978, date à laquelle ils cèdent au Musée national d’art de Bucarest Le Sculpteur Rodin. Celui-ci y rejoint un Torse de femme debout signé Camille Claudel, transféré en 1949 du musée privé d’Anastase Simu.
En 1996, Iona Beldiman, conservatrice du Musée national d’art de Bucarest, présente une exposition “Autour de Rodin”, évocation de l’artiste, de son travail et de ses proches. Évidemment, Camille Claudel et son Sculpteur Rodin sont de la partie. Nommée Le Peintre dans le catalogue raisonné d’Anne Rivière et Bruno Gaudichon édité en 1996, la statuette d’une quarantaine de centimètres était pourtant signalée comme non localisée : 1 500 km de distance et 50 ans de Rideau de fer empêchent bien des contacts... L’isolement est d’autant plus préjudiciable que le critique Mathias Morhardt, contemporain de Camille Claudel, tenait en 1898 cette pièce pour un des chefs-d’œuvre de la jeune femme : “C’est la première œuvre où elle a montré la puissance qu’elle a d’évoquer directement la vie.”
Rodin en peinture
Statue de Rodin, de Léon Lhermitte ou de Georges Hugo ? La question s’est longtemps posée, mais l’absence de l’œuvre, pourtant documentée par des écrits et par une série d’études, ne permettait pas de trancher. Anne Rivière estime que “les traits du visage rappellent en effet ceux de Rodin, sentiment corroboré par des écrits et la tradition véhiculée dans la famille Slatineanu”. Lors de l’exposition, Anne Rivière et Bruno Gaudichon confirment l’attribution à Camille Claudel. Malheureusement, leur ouvrage est déjà sous presse et cette découverte ne peut y figurer. C’est d’autant plus regrettable que Iona Beldiman a contacté la famille Slatineanu et retrouvé les trois autres œuvres qui lui étaient jusque-là inconnues. Les auteurs identifient alors l’ensemble des cinq sculptures.
Outre Le Peintre, Nu de femme accroupie attire particulièrement leur attention. Exécuté en plâtre vers 1884 et accompagné d’un surmoulage en bronze réalisé pour des raisons de sauvegarde par son propriétaire en 1950, il offre une version complète et antérieure du Torse de femme accroupie, bronze fondu vers 1885 qui se distingue par son aspect fragmentaire, bras, tête et genoux mutilés. Cette esthétique de la ruine antique, vraisemblablement décidée par l’artiste au moment de la fonte, laissait invisible la pose originale de la statue, la tête dans les bras. Ce sont donc cinq œuvres que Bucarest a dévoilées à Anne Rivière et Bruno Gaudichon, un fait que la nouvelle édition de leur catalogue, à paraître au printemps 2000 chez Adam Biro, signalera bien évidemment. Mais, d’ici là, Anne Rivière exprime son inquiétude au sujet des plâtres de La Valse et de Nu de femme accroupie. Vendus récemment par les héritiers Slatineanu, ces tirages, dont l’un demeure unique, ne sont plus localisés.
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Claudel resurgit en Roumanie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°92 du 5 novembre 1999, avec le titre suivant : Claudel resurgit en Roumanie