La Foire Internationale d’Art Contemporain promet un saut qualitatif en attirant une cohorte de galeries étrangères. Mais au détriment des professionnels français.
Les commissaires de la Foire Internationale d’Art Contemporain (FIAC), Jennifer Flay et Martin Bethenod, l’avaient martelé l’an dernier : 2006 était une année zéro. Disons en tout cas expérimentale, avec la réintégration du Grand Palais et la mise en route d’une tente tout en transparence dans la Cour Carrée du Louvre. Une édition où les exposants avaient essuyé les plâtres d’un montage chaotique et d’une indigence des services les plus basiques comme les toilettes ou la restauration. Depuis, les organisateurs ont appris à dompter l’espace. Le nouveau cru organisé du 18 au 22 octobre est donc, selon leur formule, celui de la consolidation. De l’optimisation aussi, avec l’arrivée de poids lourds new-yorkais, comme Paula Cooper, Sean Kelly, David Zwirner (lire p. 35) ou de jeunes galeries pointues comme Zero (Milan) et Johann König (Berlin). Sans être encore une major, la FIAC ne joue plus en troisième division.
Les galeries étrangères semblent visiblement moins circonspectes quant à la qualité de la scène ou des collectionneurs français. « Paris semble vivre une période excitante, observe Malin Ståhl, de la galerie Hollybush Gardens (Londres). Il y a aussi beaucoup de jeunes artistes français intéressants en ce moment. Nous travaillons ainsi avec Benoît Maire et par son intermédiaire, nous nous sommes dit que Paris pourrait être un bon contexte pour nous. » La plupart des impétrants, comme Paula Cooper, ne sont d’ailleurs venus que sur la foi du bouche-à-oreille, faute d’avoir visité la foire l’an dernier. Si autant de galeries américaines ont fait le voyage, ce n’est pas tant pour les beaux yeux de notre capitale, que dans une stratégie plus globale de conquête d’un marché européen, d’autant plus vital que l’euro est fort. C’est dans ce but que Marianne Boesky (New York) a choisi de participer en un mois à trois foires, Art Forum à Berlin, Frieze à Londres et la FIAC. À Paris, elle joue la carte du projet, en organisant un dialogue entre les œuvres traversées de Zip de Donald Moffet, les sculptures de Fontana et les Oxidation Paintings de Warhol.
Participation bicéphale
Pour ceux qui participent à Frieze la semaine précédente (lire p. 18), la tâche sera d’éviter l’impression du déjà-vu. Ainsi Thomas Dane (Londres) donne une coloration plus sculpturale et architecturale à son stand londonien et plus picturale à la FIAC, classicisme français oblige. Les prestations londoniennes et parisiennes de Zero n’affichent qu’un dénominateur commun, l’artiste Christian Frosi, dont les deux œuvres relèvent d’un processus dont l’issue se dévoilera à la foire Artissima (Turin).
L’énergie de la Cour Carrée a balayé l’an dernier les scepticismes, de sorte que les Parisiens In situ, Kamel Mennour, Michel Rein et Art : Concept ont même choisi d’y prendre un stand en sus du Grand Palais. D’après une enquête réalisée par les organisateurs, 91 % des visiteurs s’étaient rendus en 2006 sur les deux sites, une déperdition moindre qu’entre les halls 4 et 5.1 de la Porte de Versailles ! Néanmoins, Stefania Bortolami (New York), qui avait fait faux bond l’an dernier faute d’être logée au Grand Palais, a mis le même impératif à sa participation cette année. « Même si nous n’existons que depuis deux ans, nous ne voulons pas nous positionner uniquement avec des artistes émergents », indique son directeur, Simone Battisti, qui prévoit une installation de Daniel Buren et une œuvre de Tim Noble & Sue Webster, artistes déjà bien crantés.
Pour plus de visibilité, certains ont joué la carte du one-man-show. Catherine Issert (Saint-Paul-de-Vence) affiche Pier Paolo Calzolari, Catherine Bastide (Bruxelles) et Luhring Augustine (New York) s’associent pour présenter Josh Smith, tandis que Hollybush Gardens et Schleicher Lange (Paris) valorisent respectivement Andrea Büttner et Zoë Mendelson. C’est un choc des titans que propose Cheim & Read (New York) avec un dialogue entre Joan Mitchell et Louise Bourgeois, alors que Jeanne-Bucher (Paris) présente dix Non-lieux de Dubuffet, véritables testaments réalisés en 1984, alors que l’artiste était âgé de 83 ans.
Après la grogne de certains marchands, le design est transféré sous les alvéoles du Grand Palais. Un emplacement plus pertinent, dans la mesure où les prix de Jean Prouvé sont plus proches d’un Dubuffet que des jeunes pousses de l’art actuel. Cet ancrage permet le retour des Parisiens Patrick Seguin et Kreo et l’arrivée de deux impétrants, Yves Macaux (Bruxelles) et Gilles Peyroulet & Cie (Paris). La foire a toutefois mis du temps avant de confirmer le maintien de sa section design. Elle risque du coup de se faire souffler la vedette par Design London (lire p. 33). « Les galeries de design sont sensibles au fait que la Fiac leur propose d’être sur le même site que les galeries d’art, défend Jennifer Flay. Quand on fait une foire de design parallèle, on ne peut pas rester à dix comme chez nous, mais à quinze ou vingt. Notre numerus clausus permet une sélectivité. » Il faudra qu’à la sélectivité de mise dans le choix des exposants de la Fiac, réponde une même rigueur pour celui des œuvres. À juger sur pièce.
FIAC, 18-22 octobre, Grand Palais et Cour Carrée du Louvre, Paris, www.fiacparis.com, du 18 au 21 12h-20h30, le 22 12h-18h.
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Ça c’est Paris
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Abonnez-vous dès 1 €- Commissaires : Jennifer Flay et Martin Bethenod - Nombre d’exposants : 175 - Tarif des stands : 390 euros le m2 le Grand Palais et 290 euros le m2 à la Cour Carrée
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°266 du 5 octobre 2007, avec le titre suivant : Ça c’est Paris