De son propre aveu, la découverte qu’il a faite, au début des années 1980, du Japon, puis de la Corée, enfin des petites îles indonésiennes a considérablement déterminé le développement de son œuvre. Non seulement l’intérêt porté par ces cultures aux attributs de la vie quotidienne l’a profondément touché, mais sa rencontre avec l’Extrême-Orient l’a conduit à reconsidérer la force d’expression du symbole et de la métaphore.
Si Mark Brusse a été frappé par la persistance de ceux-ci en Asie dans leur rapport à l’image et à l’objet, c’est qu’ils n’avaient plus de poids, à ses yeux, en Occident que dans la seule et unique rhétorique.
À la découverte du monde
Né à Alkmaar aux Pays-Bas en 1937 et ayant suivi des études artistiques à Arnhem, Brusse compte parmi ces nombreux artistes étrangers qui sont venus s’installer à Paris dans les années 1950-1960, à l’instar d’un Erró, d’un Klasen ou d’un Spoerri. Depuis cinquante ans l’an prochain, pour sa part. L’époque était alors partagée entre manière picturale expressive et utilisation de l’objet. Sensible aux sirènes du Nouveau Réalisme, Mark Brusse réalisa toutes sortes d’objets en bois aux allures de Clôtures et de Soft machines.
Impatient d’aller à la découverte du monde, il multiplia alors les voyages au Mexique et aux États-Unis, de même qu’il chercha à expérimenter diverses pistes artistiques. Il fut lié un temps à Fluxus, réalisant quelques actions de rue et organisant un immense environnement pour un concert de John Cage.
Volontiers nomade, il a nourri son œuvre des expériences traversées au fil du temps pour la caler finalement du côté d’une forme d’universalité, conjuguant action et contemplation, spiritualité et ludisme, anecdote et philosophie. Dans l’art de l’assemblage et de l’association d’éléments inattendus, Mark Brusse est passé maître. Il combine les matériaux les plus élémentaires et les plus opposés en de petits monuments énigmatiques : un socle en bois brut, une pierre de granit bien ronde qu’il chapeaute de la figure épatée en bronze d’un visage mi-humain, mi-animal, et voilà qui devient une figure paradoxale entre art primitif et une composition davantage structurée. Il y a quelque chose d’un chaman chez Mark Brusse qui joue des éléments les plus subtils, des dynamiques les plus cachées, qui en appelle aux notions fondamentales d’énergie, de souffle et pour tout dire d’esprit.
Une œuvre universelle
Auteur de grands dessins à la détrempe sur papier végétal – Brusse est un « homme nature » –, il révèle en surface tout un monde singulier où l’humain, l’animal et le végétal sont convoqués au service d’une iconographie absorbant toutes les cultures, toutes les religions et toutes les philosophies. Un désir irrésistible de syncrétisme est à l’œuvre dans la démarche de Mark Brusse qui vise après un grand Tout rassemblant douceur et violence, sagesse et folie, Éros et Thanatos. Son art est requis par la fable et le merveilleux, l’obscur et l’éblouissement. S’il relève bien plus de l’évocation et de la suggestion que du commentaire et de l’illustration, c’est parce que Mark Brusse « voit le monde du dehors avec le regard du dedans », comme l’avait écrit si justement son ami Pierre Restany.
1937
Naissance
aux Pays-Bas.
1959
Diplômé de l’École des beaux-arts d’Arnhem.
1961
À Paris, réalise
ses premiers assemblages.
1967
À New York, rencontre
John Cage.
1975
Biennale de Venise.
Années 1980
Travaille au Japon et en Corée du Sud.
2010
Rétrospective au LAAC de Dunkerque (lire p. 96).
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Brusse - Tout-puissant
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Abonnez-vous dès 1 €« Heureusement l’art n’est pas raisonnable », LAAC de Dunkerque (59). Lire p. 96.
« Mon exposition », Orléans (45), jusqu’au 19 septembre.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°625 du 1 juin 2010, avec le titre suivant : Brusse - Tout-puissant