Les télévisions publiques belges, malgré leurs activités pionnières passées, se signalent aujourd’hui par l’absence de plus en plus totale de toute émission spécifique consacrée aux arts plastiques. L’activité des galeries n’est plus couverte, l’information se réduit aux seules expositions, et seuls de très grands événements trouvent encore place dans les journaux télévisés francophones (RTBF) ou flamands (BRT).
BRUXELLES - L’évolution des chaînes publiques tant au nord qu’au sud du pays montre à quel point, en période de crise structurelle et économique, les impératifs commerciaux des entreprises privées ont fini par l’emporter. Dans ce domaine, seule la BRT conserve un minimum d’activité, diluée il est vrai, dans des émissions culturelles généralistes aux heures de passage tardives et aux taux d’écoute des plus bas.
Une place unique, autrefois
Pourtant, il fut un temps où la télévision belge accordait une place unique en Europe aux arts plastiques. Ainsi, en 1975, Christian Bussy inaugurait "Art Hebdo" qui, chaque semaine, faisait le point des expositions et de l’activité des galeries tant dans le pays tout entier qu’à l’étranger. Le public, sans doute trop ciblé, ne justifia pas le maintien hebdomadaire de l’émission, dont la qualité était cependant reconnue. "Art Hebdo" se mua en "Art Magazine", mensuel, avant de disparaître en 1992.
Depuis cette date, les arts plastiques ont disparu de la grille horaire de la RTBF sans trouver à se replacer dans des émissions culturelles généralistes comme ce fut le cas à la BRT. Quelques rares tentatives ne sont pas parvenues à renverser la vapeur et l’association avec Arte, – d’où la RTBF s’est aujourd’hui retirée –, n’a débouché sur aucune émission spécifiquement consacrée aux arts plastiques. Dans ce panorama sombre, il convient de signaler l’initiative de Télé-Bruxelles, chaîne régionale qui ne diffuse que pour la région de la capitale, et qui produit régulièrement des émissions sur des artistes – Lismonde en 1992 – ou des expositions – Evenepoel, récemment – lorsque l’actualité le requiert. Faible consolation qui ne touche qu’un maigre public à l’échelle du pays, mais qu’il convient de saluer tant le règne de l’Audimat s’est révélé culturellement destructeur .
Le patrimoine
À côté des émissions, les télévisions belges ont aussi un patrimoine dont le salut s’est parfois avéré délicat. En témoigne le sort du bâtiment de l’INR, Institut national de radio, qui appartient aux deux communautés et qui relève donc de la RTBF et de la BRT. Ce bâtiment, dû à l’architecte Joseph Diongre et inauguré en 1935, est le premier bâtiment de radio – et bientôt télévision – spécialement conçu à cette fin en Europe. Il se dresse sur la place Flagey et témoigne d’un style moderniste original tant dans ses lignes que dans sa conception.
Afin d’offrir une parfaite acoustique, les fondations du bâtiment ont été entièrement recouvertes d’un cuivre qui, Congo oblige, ne représentait pas la valeur qu’il a actuellement. C’est à une recherche de pointe – dont les auteurs eux-mêmes disent que le résultat exceptionnel est en partie dû au hasard – que les studios de la place Flagey doivent leur succès international. Nombre d’œuvres – dont Musique pour percussions et célestas de Bartók – y seront créées avant que l’essor des télévisions ne justifie les premiers déménagements et que, peu après, les difficultés financières et les problèmes institutionnels ne cautionnent la revente de ce bâtiment. La spéculation ne se fit pas attendre : la localisation de l’édifice et le "gisement" de cuivre justifièrent tous les abus – auxquels semble être liée la disparition de l’Orchestre de la RTBF – avant que, voici seulement quelques semaines, le bâtiment soit partiellement classé.
La menace écartée, reste à transformer l’INR en un projet viable. La rumeur parle d’un accord entre la commune d’Ixelles et un groupe privé français pour installer place Flagey un centre de conférences, qui redonnerait vie au Studio 4 et doterait Bruxelles d’un outil unique en son genre.
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Belgique : Une absence totale
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°4 du 1 juin 1994, avec le titre suivant : Belgique : Une absence totale