Au cœur du passé bisontin

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 7 juillet 2006 - 635 mots

Le riche patrimoine urbain de Besançon, de la préhistoire à l’époque médiévale, resurgit au Musée des beaux-arts et d’archéologie de la ville. Une invitation à relire l’histoire à partir des vestiges archéologiques

Le Doubs entoure presque la ville d’un cercle que l’on dirait tracé au compas. » Si aucun Bisontin n’ignore cette phrase tirée des Commentaires sur la guerre des Gaules de César, lequel combattit en 58 avant J.-C. les Helvètes puis les Germains d’Aroviste lors de sa campagne dans la région contre les peuplades celtes, peu connaissent en détail les dix-sept siècles d’histoire de leur ville. Cette grande exposition du Musée des beaux-arts et d’archéologie de Besançon, prolongée par un parcours urbain permettant de localiser les principaux vestiges, viendra sans doute combler quelques lacunes.
Car s’il est une ville qui se prête à cette remontée dans le temps par l’archéologie, c’est bien l’ancienne Vesontio, où chaque entrepreneur tremble avant de donner un coup de pioche. Son site naturel n’y est pas étranger : installée dans le méandre d’un fleuve dont le lit recèle encore de nombreux témoignages du passé et protégée par un ruban de collines, la ville a toujours bénéficié d’une protection naturelle propice à l’installation humaine.
Avant de devenir une garnison romaine, Besançon fut un site d’occupation dès la préhistoire, comme en témoignent l’outillage lithique et les objets en bronze découverts lors de fouilles. C’est à la fin du IIe siècle avant J.-C. que s’installèrent les Séquanes, une confédération de peuples gaulois qui y érige un oppidum, protégé par un rempart dont un fragment, construit avec la technique du murus gallicus, a été récemment mis au jour. Une maquette permet de comprendre la technique complexe de ce mur – ainsi baptisé par César –, constitué d’une alternance de poutres de bois et de terre. Les fouilles ont par ailleurs révélé l’existence d’un habitat dense, lui aussi construit exclusivement en terre et en bois, une tradition qui se perpétua après la conquête romaine alors que les rues adoptent un tracé orthogonal et que les quartiers s’organisent par fonction. Ce n’est toutefois que vers 40, sous le règne de Tibère, qu’apparaissent les premières domus, ces vastes résidences urbaines en pierre dont deux vestiges majeurs ont été exhumés à Besançon. La plus grande d’entre elles, retrouvée à l’emplacement d’un collège et d’une superficie de 6 000 mètres carrés, était décorée de luxueuses mosaïques, dont celle dite « de Neptune », l’une des plus importantes de France.
La Vesontio romaine demeure la strate la mieux connue de l’histoire urbaine de Besançon, plusieurs monuments antiques y ayant été localisés, tels le théâtre, l’aqueduc ou encore cet arc de triomphe orné de reliefs sculptés, appelé la « Porte Noire » et daté du règne de Marc Aurèle. Dès le IIIe siècle, la ville connaît toutefois un inexorable déclin, lié aux troubles des invasions barbares puis à l’émergence de la féodalité. Alors que l’Église s’impose progressivement comme la puissance dominante et restructure la ville autour des édifices de culte, sa croissance stagne jusqu’à la fin du XIVe siècle. Peu de traces subsistent de cette époque, dont l’histoire se dessine grâce à la découverte d’objets de la vie quotidienne dans des structures en creux – puits, fosses, latrines  – et grâce à des tracés viaires. La visite s’achève avec quelques visions contemporaines et une judicieuse interrogation sur les futurs vestiges du XXIe siècle, vus à travers le prisme d’artistes contemporains comme Michel Blazy, Paul Pouvreau ou Didier Marcel.

- De Vesontio à Besançon. La ville s’expose, jusqu’au 27 novembre ; -Archéologie, le jour d’après, jusqu’au 25 septembre, en collaboration avec le FRAC Franche-Comté, Musée des beaux-arts et d’archéologie, 1, place de la Révolution, 25000 Besançon, tél. 03 81 87 80 49, www.besancon.fr/vesontio, tlj sauf mardi 9h30-12h30, 14h-18h. Catalogue, coéd. Chaman/Musée des beaux-arts et d’archéologie de Besançon, 140 p., 22 euros.

Les grandes expositions d’archéologie de l’été

- L’Institut national de recherches archéologiques préventives présente ses dernières découvertes : Cent mille ans sous les rails. Archéologie de la Ligne à grande vitesse est-européenne, jusqu’au 3 déc., Musée des beaux-arts et d’archéologie, place Alexandre-Godart, 51 000 Châlons-en-Champagne, tél. 03 26 69 38 53, tlj sauf mardi 14h-18h, dim. 14h30-18h30 ; Instants d’éternité, mausolées et tombeaux antiques d’Aoste, jusqu’au 30 novembre, Musée gallo-romain, 38490 Aoste, tél. 04 76 32 58 27, tlj sauf mardi 14h-18h. - À Marseille, une exposition est consacrée aux échanges entre Grecs de Sicile et peuplades indigènes : Des Grecs en Sicile… Grecs et indigènes en Sicile occidentale d’après les fouilles archéologiques, jusqu’au 20 août, Musée d’archéologie méditerranéenne, Centre de la Vieille Charité, 2, r. de la Charité, 13002 Marseille, tél. 04 91 14 58 59, tlj sauf lun. 11h-18h. - Lyon propose une confrontation entre la réalité archéologique et les clichés véhiculés sur la religion des Gaulois : Par Toutatis ! La religion des Gaulois, jusqu’au 7 jan. 2007, Musée gallo-romain de Lyon-Fourvière, 17, rue Cléberg, 69005 Lyon, tél. 04 72 38 49 30, tlj sauf lundi 10h-18h. - Les Celtes sont à l’honneur à Bibracte (Saône-et-loire), haut lieu de la guerre des Gaules, et à Mariémont (Belgique) : Trésors de femmes, Musée de Bribacte, jusqu’au 12 nov., mont Beuvray, 71990 Saint-Léger-sous-Beuvray, tél. 03 85 96 52 35, tlj 11-19h (18h en sept.). Celtes. Belges, Boïens, Rèmes, Volques…, jusqu’au 3 déc., Musée royal de Mariemont, chaussée de Mariemont, 100, Morlanwelz (Belgique), tél. 32 64 21 21 93, tlj sauf lun. 10h-18h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°241 du 7 juillet 2006, avec le titre suivant : Au cœur du passé bisontin

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