COLOGNE (ALLEMAGNE) [03.10.11] – Wolfgang Beltracchi a reconnu la semaine dernière être l’auteur des quatorze faux tableaux de maîtres qui affolent le marché de l’art depuis décembre 2010. Ces aveux ont été confirmés par sa femme et pourraient leur valoir des peines plus légères que celles prévues initialement.
Leur procès devait durer sept mois, il sera probablement beaucoup plus court. Wolfgang et Helene Beltracchi ont avoué la semaine dernière être effectivement à l’origine des fausses toiles de maîtres qui ont circulé sur le marché de l’art depuis les années 80. Wolfgang peignait, Helene les faisait expertiser et les introduisait sur le marché. Une production bien réglée que le faussaire a détaillée devant le tribunal de Cologne pendant plus d’une heure.
Le récit épique de la vie du faussaire avait déjà animé le premier jour du procès, celui de la création de ses tableaux ne l’est pas moins. Wolfgang achète ses toiles sur des brocantes et des marchés aux puces français. Il crée ses couleurs selon les compositions chimiques de l’époque, se documente sur les peintres qu’il copie, sur leur manière de vivre, de travailler. Il s’imprègne totalement des informations collectées et conçoit alors « les toiles manquantes » des artistes, celles qu’ils auraient dû réaliser. Il peint dans un état qu’il qualifie proche de l’hypnose, le pinceau dans la main gauche si le peintre était gaucher. Le résultat est plus vrai que nature, parfois même meilleur que les véritables toiles. Et pour cause, Beltracchi a un avantage certain sur les peintres qu’il copie : il connaît leur évolution artistique.
Si le génie de son mari ne surprend pas Helene Beltracchi, elle se dit par contre toujours étonnée de l’aisance avec laquelle les tableaux ont trompé les meilleurs experts. « C’était absolument facile ». Werner Spies, considéré comme le plus grand spécialiste de Max Ernst, a en effet expertisé pas moins de sept fausses toiles de l’artiste. Une lourde erreur pour l’expert à qui les clients floués réclament maintenant un dédommagement.
C’est en partie en réaction à ce monde d’experts et du marché de l’art que Wolfgang Beltracchi dit avoir commencé à réaliser des faux. Par colère, par frustration et manque de reconnaissance. « Je n’aimais pas particulièrement le marché de l’art et les galeristes » reconnaît-il avant de raconter comment par la suite, les grands du milieu spéculaient sur ses propres faux.
Ces déclarations romanesques tournent cette gigantesque escroquerie en une revanche sur la vie et donnent à Beltracchi un visage plutôt sympathique. La « bande Beltracchi » a en effet plutôt bonne presse outre-Rhin. A tel point que le Frankfurter Allgemeine Zeitung se sent obligé d’insister sur la gravité des agissements de celui que le Spiegel qualifie gentiment de « filou ». Le journal rappelle que l’escroquerie est à l’origine de pertes colossales pour les galeries, les experts et les marchands.
Les aveux rapides du couple devraient influer sur la durée de leurs peines. Wolfgang risquerait à présent au maximum six ans de prison contre dix initialement. La peine d’Helene s’élèverait à quatre ans de réclusion. Sa sœur et le quatrième inculpé, Otto Schulte-Kellinghaus, pourraient quant à eux passer respectivement deux et cinq ans derrière les barreaux.
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Les faussaires allemands ont reconnu leur méfait
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Abonnez-vous dès 1 €Cette huile sur toile de Max Pechstein (cliquez sur le détail en vignette pour voir le tableau), Pont et barges sur la Seine, 1908, provenant de la « collection Jägers » a été vendue par Lempertz à Cologne en 2001. Photo D. R.