BIOT
Installé à Biot, dans les Alpes-Maritimes, le Musée Fernand-Léger vient de rouvrir ses portes avec une exposition sur les congés payés. Picasso et Chagall sont également à l’honneur dans le département.
Par un heureux hasard du calendrier, la rétrospective « Fernand Léger » de la Fondation Beyeler, à Bâle (lire p. 22), coïncide avec la réouverture du musée consacré à l’artiste et construit à Biot (non loin de Nice) par André Svetchine à la demande des héritiers Léger au lendemain de sa mort, en 1955. Pourtant fermé quatre ans durant, l’édifice n’a pas subi de transformations en profondeur. Et les travaux, d’un coût total de 600 000 euros, auraient pu être achevés rapidement si l’institution n’avait cumulé lourdeurs administratives et défaillances de la part des entreprises missionnées. L’opération a consisté à doter l’établissement d’un espace d’accueil digne de ce nom, d’un auditorium et d’ateliers pédagogiques. Il s’agissait aussi de repenser la muséographie et d’ouvrir le musée sur son jardin, initialement conçu par Henri Fish. Pour ce, l’architecte, Marc Barani, a imaginé une grande baie vitrée courant le long de la façade ouest. Les visiteurs peuvent ainsi apercevoir le jardin de part et d’autre du nouveau hall d’accueil baigné de lumière. La scénographe, Birgitte Fryland, a quant à elle scindé les espaces permanents à l’aide de grandes cimaises offrant une meilleure lisibilité aux œuvres. Celles-ci se trouvaient auparavant perdues, malgré leur nature imposante, au milieu des vastes espaces du premier étage.
Lorsqu’en 1967 Nadia Léger et Georges Bauquier décident de léguer le musée « clefs en main » à l’État, leur fonds compte 348 numéros d’inventaire : peintures, dessins, sculptures, céramiques, tapisseries et bronzes. Depuis, la collection a été enrichie par des acquisitions et des dépôts du Musée national d’art moderne/Centre Pompidou, portant à 450 le nombre de pièces conservées. Le nouveau parcours permanent n’en a retenu qu’une quarantaine, pouvant être régulièrement renouvelées. L’ensemble se déploie suivant une logique à la fois chronologique et didactique. « L’accrochage se veut le plus pédagogique possible, afin de rendre compte des éléments primordiaux chez Léger : le postulat de la couleur affirmée comme telle, la dislocation de la forme et de la couleur, l’affirmation du dessin », explique Maurice Fréchuret, directeur des musées nationaux du XXe siècle des Alpes-Maritimes dont fait partie le musée de Biot. Les Loisirs sur fond rouge (1949), sur le thème du bonheur sublimé par la couleur, Les Quatre Cyclistes (1942-1948), dans lequel le dessin figuratif et les touches colorées se trouvent dissociés, et la très calligraphique Grande parade sur fond rouge (1953) illustrent respectivement les trois aspects fondamentaux de la production de Léger ainsi distingués par Fréchuret. Les restaurations menées à l’occasion des travaux ont, en outre, redonné à plusieurs tableaux, à l’instar du Grand Remorqueur (1923), leurs force et éclat d’origine.
Dans ses espaces d’exposition temporaire, saison estivale oblige, le musée a choisi pour sa réouverture d’exposer les différentes versions de La Partie de campagne exécutées par Léger à la fin de sa vie. Celles-ci sont présentées aux côtés de photographies signées de ses amis photographes, tels Willy Ronis ou Robert Doisneau, pour évoquer l’allégresse liée à l’avènement des congés payés. « C’est après la Seconde Guerre mondiale et avec les “trente glorieuses” que la société de loisirs se met réellement en place. Au moment du Front populaire, en 1936, la période est encore celle des revendications du loisir », précise Maurice Fréchuret. À l’automne, Les Constructeurs (1950) et le monde ouvrier feront à leur tour l’objet d’une exposition-dossier. Également directeur du Musée Picasso de Vallauris et du Musée Chagall à Nice, Maurice Fréchuret souhaite que ces établissements nationaux situés dans l’extrême sud-est de la France travaillent plus en synergie. Ainsi accueilleront-ils conjointement en 2009 une manifestation autour de Blaise Cendrars, écrivain qui fut proche tant de Léger que de Picasso et Chagall. En attendant, la chapelle où se déploie La Guerre et la Paix abrite cet été les œuvres céramiques de Richard Deacon dans le cadre de la 20e édition de la Biennale de céramique contemporaine. De son côté, le Musée Chagall explore le thème de la fenêtre dans l’œuvre de l’artiste russe. Tour à tour lucarne, porte, ouverture, la fenêtre est le lieu de « formation du regard de l’artiste, qui lui permet de construire une image », explique Maurice Fréchuret. En témoigne Vue de la fenêtre à Zaolchie (1915). Véritable ode au couple qu’il forme avec Bella, cette toile prêtée par la Galerie Tretiakov, à Moscou, est la plus remarquable de l’exposition selon sa commissaire, Élisabeth Pacoud-Rème, chargée d’études documentaires au Musée Chagall.
Musée national Fernand-Léger, chemin du Val-de-Pome, 06410 Biot, tél. 04 92 91 50 30, www.musee-fernandleger.fr, tlj sauf mardi 10h30-18h (horaires d’été) ; « “La Partie de campagne”?, Fernand Léger et ses amis photographes », jusqu’au 29 septembre. Album des collections du musée, éd. RMN, 2006, 128 p., 19,50 euros ; catalogue de l’exposition, éd . RMN, 74 p., 25 euros.
Musée national Message biblique Marc-Chagall, av. du Docteur-Ménard, 06000 Nice, tél. 04 93 53 87 20, tlj sauf mardi 10h-18h (horaires d’été). À voir : « Marc Chagall, un peintre à la fenêtre », jusqu’au 13 octobre. Catalogue, éd. RMN, 144 p., 35 euros.
Musée national Picasso-La Guerre et La Paix, place de la Libération, 06220 Vallauris, tél. 04 93 64 71 83, tlj sauf mardi, 10h-12h15 et 14h-18h (horaires d’été).
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Visite sous un soleil Léger
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Abonnez-vous dès 1 €L’actualité culturelle se montre des plus riches cet été pour le département des Alpes-Maritimes. Un mois, jour pour jour, après le Musée Léger à Biot, ce sera au tour de son voisin le Musée Picasso d’Antibes d’inaugurer, le 20 juillet, des espaces entièrement rénovés. Propriété de la Ville, installé dans l’élégant château Grimaldi, l’établissement a fait l’objet de vastes travaux de rénovation et de restauration, s’élevant au total à 4 millions d’euros dont 2,6 millions pour la partie historique du monument. L’essentiel des travaux a concerné sa mise aux normes – sécurité incendie, accessibilité pour les personnes à mobilité réduite et installation de la climatisation. Le conservateur Jean-Louis Andral en a profité pour revoir entièrement le parcours avec une circulation plus cohérente (les visiteurs ne sont plus obligés de revenir sur leurs pas). Au deuxième étage, le mur datant des années 1970 a été supprimé pour rendre son aspect originel à l’atelier de Picasso. Ce niveau lui est ainsi entièrement dévolu, tandis que le premier étage abrite les espaces d’expositions temporaires et la collection Nicolas de Staël comprenant Le Concert. Enfin, au rez-de-chaussée, outre l’accueil, ont été installées des œuvres de la donation Hartung-Bergman. Musée Picasso, château Grimaldi, 06 600 Antibes, tél. 04 92 90 54 20.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°285 du 4 juillet 2008, avec le titre suivant : Visite sous un soleil Léger