Versailles se raconte dans sa nouvelle galerie de l’Histoire

Versailles. « Le château est comme une créature transformable, qui n’arrête pas de grandir et de se développer », s’émerveille Laurent Salomé, directeur du Musée national des châteaux de Versailles et de Trianon qui célèbre cette année les 400 ans du château. Afin d’aider le public à mieux appréhender l’évolution du domaine, ponctuée de nombreux aménagements successifs, la galerie de l’Histoire fait office d’introduction à la visite des lieux depuis 2011. Abrité dans une enfilade de 11 salles, au rez-de-chaussée de l’aile Nord du château, le lieu méritait, selon Laurent Salomé, d’être repensé. « La précédente version se voulait résolument moderne, mais a assez mal vieilli et présentait des problèmes de modularité. Aujourd’hui, nous sommes beaucoup plus en accord avec l’atmosphère générale du château », explique-t-il. La nouvelle la galerie créée à partir de gravures correspondant à chaque période procède par chronologie et par thématiques.

Financée grâce au mécénat de Free et des époux Spiegel (Evan Spiegel est le fondateur de Snapchat) à titre personnel, avec le soutien de la Région Île-de-France et en partenariat avec Google Arts & Culture, cette exposition permanente est un voyage dans le temps. De la création du site par Louis XIII qui fait édifier, en 1623, un modeste relais de chasse, en passant par sa transformation en palais digne d’un grand roi par Louis XIV et aux métamorphoses intérieures opérées par Louis XV, le parcours se penche aussi sur le sort du palais pendant et après le règne de Louis XVI, marqué par la fin de l’Ancien Régime.

Le parcours est enrichi de contenus numériques instructifs (reconstitutions 3D, survol en drone du domaine, vidéos d’archives et maquettes tactiles), mais ces productions audiovisuelles ne sont pas l’attraction principale. « Pour raconter l’histoire du château de Versailles, les documents les plus parlants sont des chefs-d’œuvre », plaide Laurent Salomé. C’est donc à travers plus d’une centaine d’œuvres exceptionnelles que l’on revisite le château de Versailles, en commençant par les célèbres portraits des rois.

Disposés sur les murs de la première salle, les portraits des rois précèdent ceux des artistes ayant façonné le château au fil des siècles, ainsi que les toiles représentant le domaine et ses jardins, et les objets témoins des événements historiques vécus au cœur du château, comme le bureau sur lequel a été signé le Traité de Versailles, en 1919. Autant de pièces qui, jusqu’à présent, n’étaient pas forcément présentées de manière appropriée. « Le buste de Louis XVI par Jean-Antoine Houdon était installé dans l’antichambre de l’Œil-de-bœuf, et on ne lui prêtait pas beaucoup attention, regrette Laurent Salomé. Mais depuis qu’il est au centre de la salle, bien éclairé, on peut se rendre compte qu’il s’agit probablement du plus beau portrait existant de Louis XVI ! »

Beaucoup d’espaces vides ont été comblés grâce à l’ajout de nouvelles œuvres d’art. Certaines ont été acquises, comme un minuscule tableau montrant Louis XVIII visitant la galerie des Glaces en travaux, acheté lors d’une vente aux enchères à Rouen, ou encore la sculpture monumentale en marbre Zéphir, Flore et l’Amour, qui décorait les jardins du Grand Trianon et offerte au château en 2022 par la République d’Angola.

D’autres objets ont été retrouvés dans les réserves : c’est le cas des impressionnantes gaines de la bibliothèque de Madame Sophie, surmontées par de grands vases pot-pourri dont le stuc imite l’albâtre, montrées au public pour la première fois. De la même façon, un piédestal en brèche grise récemment identifié est maintenant visible. Ces vestiges permettent aussi de raviver le souvenir de lieux mythiques dont il ne subsiste rien aujourd’hui, comme les appartements de Madame Sophie et les appartements des Bains de Louis XIV, où était posé le piédestal précédemment cité.

Loin de se cantonner à ce Versailles disparu, la galerie montre également ce qu’est devenu le château après la Révolution française, de la fin de l’ancien régime à sa transformation en musée. Son rôle politique est aussi mis en avant, dans la dernière salle, avec des archives vidéo rappelant, au moment où est organisé un dîner en l’honneur de Charles III, les visites des chefs d’États internationaux des XXe et XXIe siècles. Enfin est rappelée son importance en tant que lieu symbolique des plus grandes fêtes et de la création artistique contemporaine. De quoi se souvenir que le château de Versailles est aussi le miroir de 400 ans d’histoire de France.