Dans l’hôtel particulier où vécut le sculpteur, l’Augustine fait bon accueil aux amateurs d’art, à deux pas des bronzes parsemant le jardin.
L’hôtel particulier de la rue de Varenne fut bâti vers 1730 par un financier. Bientôt habité par des aristocrates, le domaine fut racheté et réaménagé par les religieuses du Sacré-Cœur de Jésus, puis dans l’attente d’être à nouveau vendu, loué en appartements au début du XIXe siècle. Parmi les locataires : la sculptrice allemande Clara Westhoff, épouse de Rainer Maria Rilke grâce auquel Rodin découvre le bâtiment et son parc. Coup de foudre. Il y installe en 1909 son atelier au rez-de-chaussée et quelques-unes de ses statues sur les pelouses à l’abandon. Après quoi, plus question de quitter les lieux. L’artiste obtient de l’État, en échange du don de toute son œuvre, le droit de résidence à vie dans ce qui deviendra dix ans plus tard son musée. Une simple véranda abrite le restaurant et c’est assez : le regard est aimanté par le miracle de ce jardin peuplé de sculptures au cœur de Paris.
On craint le pire en faisant la queue pour commander sa formule. Heureusement, si on regarde bien le menu, on apprend qu’une cheffe est cachée dans le décor – un peu comme Camille Claudel et son œuvre, au premier étage du musée. Amandine Chaignot (à la tête des restaurants Pouliche et Café de Luce) signe en effet le plat (ce jour-là, un bar aux légumes d’une belle simplicité) et la salade gourmande (un mélange nourrissant et moelleux de céréales, potimarron, tomates séchées et feta). Deux madeleines au beurre ou un riz au lait au caramel en guise de dessert, la gentillesse du service et un rayon de soleil entre deux nuages clôturent ce repas de bon aloi qui ne fait pas semblant de rivaliser avec le génie du lieu tout en remplissant honnêtement son contrat (à un tarif très abordable).
En foulant le fin gravier des allées pour rejoindre la véranda du restaurant, on surprend la course d’un lapin entre deux cyprès taillés. Dans ces lieux solennels, où sont érigés des bronzes musculeux et des figures du désespoir taillées au burin, ce mouvement furtif surprend et réjouit. Aux beaux jours, on peut même s’attabler à la terrasse du restaurant, à deux pas de la Porte de l’Enfer (dans sa version en fonte réalisée en 1928), au beau milieu du paradis.
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Un déjeuner avec Rodin
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°774 du 1 avril 2024, avec le titre suivant : Un déjeuner avec Rodin