Pourquoi les musées n’ont pas mis en ligne de visite guidée de leur exposition en cours

France. Si les musées continuent à faire vivre leurs collections permanentes sur Internet, il paraît étonnant que leurs expositions ne bénéficient pas de la même visibilité. Amélie Simier, directrice du Musée Bourdelle, ne serait pas opposée à la mise en ligne d’une visite guidée des « Contes étranges de Niels Hansen Jacobsen ». Mais « tourner maintenant est impossible : les expositions sont dans le noir et on n’y a plus accès », explique-t-elle. Au teasing habituel réalisé par Paris Musées, elle ne prévoit que d’ajouter des liens avec les articles et émissions qui lui ont été consacrés. Conservateur au Musée Condé de Chantilly, Mathieu Deldicque (photo ci-dessus), commissaire de l’exposition « Raphaël à Chantilly, le maître et ses élèves » restée ouverte une semaine, a pu mettre en ligne la visite guidée filmée par le blog ScribeAccroupi.fr juste avant le confinement, ce que ne peut pas faire Olivia Voisin, directrice des musées d’Orléans, pour « Jean-Marie Delaperche, un artiste face aux tourments de l’histoire ». Car, même si l’équipe du Scribe accroupi est venu filmer, hors les réseaux sociaux, le musée ne possède qu’une page Internet sur le site d’Orléans Métropole qui ne peut héberger de vidéo. « Nous avions un projet de mise en ligne des expositions qui a été fauché par le coronavirus. C’est la première exposition pour laquelle nous allons effectuer une captation en 360° afin qu’elle puisse être vue de manière pérenne. » Un projet qui ne pourra être filmé qu’après la sortie du confinement.

D’autres expositions n’ont pas pu rencontrer le public. Au Musée Jacquemart-André, « Turner, peintures et aquarelles » s’est ouverte le 13 mars pour fermer ses portes le lendemain. Dans ce musée de gestion privée, on travaille actuellement à la réalisation d’une visite virtuelle. À quelques encablures de là, la collection de dessins des Prat devait être présentée au Petit Palais, à partir du 24 mars. L’exposition n’est pas complètement montée. « Nous avons l’habitude de mettre en ligne les interviews des commissaires et une vidéo qui montre les salles, précise Christophe Leribault, directeur du musée. Mais nous n’avons pas eu le temps de tourner. » Il envisage un pis-aller : « Avec un téléphone, on peut filmer une pastille devant une œuvre et c’est sympathique dans l’urgence. Je vais peut-être essayer ces jours-ci. » Rien à voir, cependant, avec une visite guidée.

Au Musée d’art et d’histoire de Dreux, « Vlaminck, le tumulte de la matière » devait débuter le 12 avril. « L’exposition n’est pas entièrement montée, précise le directeur, Damien Chantrenne. Mais, même si j’avais pu la filmer, je ne l’aurais pas mise en ligne ; j’aurais eu l’impression de trahir ce moment important qu’est le vernissage pour un musée de proximité. En outre, dans un premier temps, il faut voir les œuvres en vrai, surtout pour Vlaminck qui a une matérialité très forte. » Et c’est bien ce qui explique le « retard à l’allumage » pour les visites guidées en ligne. Tous les responsables de musées privilégient le contact direct du public avec les œuvres et la scénographie. Ils n’ont pas voulu risquer de se priver des visiteurs qui viendraient à la réouverture. Ce n’est qu’aujourd’hui qu’ils imaginent, pour certains, d’en dévoiler plus sur Internet. Trop tard en période de télétravail, à moins de se contenter du smartphone du directeur…