Entretien avec Philippe Bélaval, président du Centre des monuments nationaux (CMN) depuis 2012.
C’est un monument que le public a toujours connu fermé, puisqu’il a servi de Garde-Meuble de la Couronne, puis de poste de commandement militaire. Aujourd’hui, nous ouvrons très largement ses portes et nous espérons que cela va susciter une grande curiosité. D’autant que ce chantier a donné lieu à des travaux de restauration et de restitution extrêmement importants, portant notamment sur l’appartement des anciens intendants du Garde-Meuble.
Pour la première fois dans un des monuments que nous gérons, nous avons entrepris une démarche de restitution très immersive pour retrouver l’ambiance des grandes demeures du XVIIIe siècle. Nous avons dégagé les peintures et les dorures de l’époque, mais aussi réinstallé le mobilier qui était là ou un mobilier équivalent. Il va ainsi y avoir plusieurs centaines de meubles et d’objets dès l’ouverture, déposés par de prestigieuses institutions dont le Mobilier national, le Musée du Louvre et le château de Versailles. Nous avons aussi travaillé sur les textiles anciens et un éclairage adapté pour retrouver l’apparence des appartements, ainsi que sur l’ambiance olfactive afin de créer une véritable immersion fondée sur des recherches scientifiques et historiques. De plus, le visiteur parcourra le lieu avec un accompagnateur numérique intégré à un casque, qui restituera l’ambiance sonore de ces appartements. C’est un parti de restauration très novateur dans les Monuments historiques en France.
En effet, il y a plusieurs parcours de visite : le parcours XVIIIe siècle, le parcours des grands salons d’apparat de la Marine et de la loggia, et la Galerie Al Thani, où le public pourra découvrir des expositions réalisées à partir de cette collection conservant des objets de toutes les civilisations et de toutes les époques. Le fil rouge de la visite du monument, c’est l’excellence. Notre volonté est de proposer un projet extrêmement qualitatif en plein cœur de Paris dans lequel, quels que soient leurs goûts et leurs centres d’intérêt, les visiteurs pourront vivre un moment d’exception. Qu’il s’agisse simplement de profiter d’une vue absolument unique sur la capitale, de se pencher sur l’art de vivre au XVIIIe ou encore de découvrir les œuvres d’une collection privée prestigieuse.
Nous l’avons pensé comme un projet patrimonial global, car c’est plus qu’un projet culturel, c’est aussi un lieu de vie et de mise en valeur de tout un quartier grâce à l’ouverture des cours et la création d’un café, d’un restaurant, d’un bar et d’une librairie-boutique. Il y a aussi des bureaux que nous allons louer pour rembourser l’emprunt que nous avons contracté pour financer le chantier. Il s’agit d’un mode de financement très original avec très peu de subventions publiques, puisqu’elles ne représentent que 10 millions sur un total de 130 millions ; le reste étant composé de fonds propres et d’un emprunt. Ce projet de mise en valeur est très important, car il montre que le patrimoine, ce n’est pas simplement une source de dépenses, mais qu’il peut aussi être un investissement utile à la collectivité. En ce sens, ce projet est un véritable laboratoire.
Reconversion
Poste de commandementjusqu’au départ de l’état-major en 2015, l’avenir de l’hôtel de la Marine a donné lieu à de longs débats jusqu’à ce que le CMN soit chargé de l’ouvrir à la visite.
130 millionsC’est le budget de ce chantier titanesque débuté en 2017 et portant sur plus de 12 000 m2, consistant à restaurer, mettre aux normes et remeubler le célèbre monument de la place de la Concorde.
« Un temps pressenti pour accueillir un grand complexe dédié aux métiers de l’artisanat puis une extension du Musée du Louvre, ce magnifique édifice, construit par l’architecte Ange-Jacques Gabriel entre 1758 et 1765 place de la Concorde à Paris, a bien failli être vendu. » Baudouin Eschapasse, Le Point.fr, 29/03/2017.
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Philippe Bélaval : Le fil rouge de l’Hôtel de la marine, c’est l’excellence
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°741 du 1 février 2021, avec le titre suivant : Philippe Bélaval : Le fil rouge de l’Hôtel de la marine, c’est l’excellence