Marie-Thérèse Caille, conservateur du Musée départemental de l’école de Barbizon présente La Hutte des charbonniers, peinte vers 1848 par Théodore Rousseau (1812-1867).
Labellisé « Musée de France », le Musée départemental de l’école de Barbizon occupe depuis 1995 deux lieux de mémoire dans le village, la maison-atelier de Théodore Rousseau et l’ancienne auberge Ganne où ont séjourné, entre 1824 et 1870, un grand nombre de peintres paysagistes et animaliers venant travailler en forêt de Fontainebleau.
Tous, élèves de l’école des beaux-arts à Paris, préparent le Concours de Rome de paysage historique et viennent étudier « la Nature chez elle » comme le dit Théophile Gautier, pour affronter ensuite l’épreuve de « l’arbre ». La forêt de Fontainebleau, site très accessible depuis Paris, soit par diligence qui les mène à Chailly-en-Bière, soit par le train qui, depuis 1849, les conduit à Melun ou à Fontainebleau, leur offre un livre ouvert de sujets... En 1824, les époux Ganne ouvrent une auberge où ils offrent le gîte et le couvert pour un prix modique. La nouvelle se répand vite dans les ateliers parisiens qui se vident du printemps à l’automne pour la forêt de Fontainebleau, devenue, suivant l’expression d’Étienne Moreau-Nélaton « une succursale de l’Italie ».
En 1847, Théodore Rousseau, nommé à l’époque le « Grand Refusé » en raison du refus sucessif de ses œuvres par le jury du Salon, loue une petite maison à Barbizon où il séjourne jusqu’à sa mort en 1867.
En 1849, Jean-François Millet quitte Paris pour Barbizon où il demeure avec sa famille jusqu’à sa mort en 1875.
Toutes les conditions sont alors réunies pour faire de ce hameau en lisière de forêt un lieu mythique qui, grâce aux artistes, va conquérir une renommée internationale : la forêt de Fontainebleau, l’auberge Ganne et la présence de deux maîtres au talent incontesté.
Mais, vers 1875, pour cette génération d’artistes disparue, commence l’ « ère de l’exploitation commerciale » ; il faut attendre 1981 et la création d’un musée municipal contrôlé par l’État pour rendre leur place aux artistes ayant fréquenté le vieux Barbizon.
Modeste, l’institution est installée dans l’ancienne maison-atelier de Théodore Rousseau et ne propose au public qu’une trentaine d’œuvres de petits maîtres du paysage du XIXe siècle. Pourtant les visiteurs français et étrangers sont déjà nombreux.
En 1987, la chance permet d’acquérir l’auberge Ganne avec une partie des meubles et décors d’origine. Au rez-de-chaussée, les trois salles anciennes de l’auberge restituent l’atmosphère chère aux peintres ; à l’étage, les collections permanentes du musée sont accrochées dans les anciens dortoirs. Mais, malgré les donations et les achats, les artistes aux noms célèbres comme Rousseau, Millet, Diaz réclamés par le public, ne figurent toujours pas sur les cimaises de l’auberge, qu’un article de l’Illustration comparait en 1858 à la « villa Médicis ».
L’attente des visiteurs sera récompensée en 2004 par les dépôts exceptionnels de trois musées nationaux, le Musée du Louvre, le Musée d’Orsay et le Musée national du château de Fontainebleau : La Hutte des charbonniers, de Théodore Rousseau, peinte vers 1848, rappelle que l’auteur a déposé sa signature sur les registres de police de l’auberge Ganne le 21 avril de la même année (dépôt du Musée du Louvre). L’artiste, encore influencé par Ruisdael, cherche déjà à rendre le plein air sous la lumière du soleil de midi.
Le Paysage sous un ciel orageux, de Narcisse Diaz de la Peña, est un bel exemple du travail du plus ardent disciple de Théodore Rousseau (dépôt du Musée d’Orsay). Avec La Couseuse, image robuste du monde paysan qu’il affectionne, Jean-François Millet rejoint ses amis dans la même salle (prêt exceptionnel du Musée d’Orsay).
Ce tableau légué en 1905 au Louvre par Hélène Cuvelier, fille de Louise Ganne et d’Eugène Cuvelier, et petite-fille des célèbres aubergistes, a peut-être fait partie du décor d’origine du lieu.
Enfin, bien que n’appartenant pas à l’école de Barbizon, Rosa Bonheur est présente par trois bronzes d’animaux, dépôts du Musée national du château de Fontainebleau, pour le plaisir des visiteurs anglo-saxons et aussi seine-et-marnais, qui retrouvent la « châtelaine de By ».
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Marie-Thérèse Caille, Conservateur du Musée départemental de l’école de Barbizon
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°206 du 7 janvier 2005, avec le titre suivant : Marie-Thérèse Caille, Conservateur du Musée départemental de l’école de Barbizon