Vingt ans après avoir commencé à les pister, le Musée d’Orsay acquiert enfin deux magnifiques bustes de Charles Cordier.
En 2004, le Musée d’Orsay organisait une grande exposition consacrée à Charles Cordier (1827-1905), qui allait relancer l’intérêt pour cet artiste attachant. L’établissement recherche alors activement les bustes du Chinois et de la Chinoise exécutés pour le Salon de 1853 ; les deux pièces atypiques dans la carrière du sculpteur demeurent hélas introuvables. Deux décennies plus tard, l’institution parvient enfin à dénicher les œuvres et à les acquérir, faisant ainsi d’Orsay la collection de référence pour Cordier.
Si le musée possédait déjà des pièces emblématiques du sculpteur, notamment des œuvres de provenance impériale, il ne conservait pas d’œuvres réalisées grâce à la galvanoplastie. Charles Cordier, surtout connu pour ses bustes alliant marbre et onyx, s’essaie pour ces bustes à une technique moderne, utilisant l’électrodéposition pour recouvrir un objet d’une fine couche de métal. Ce procédé lui permet de produire à moindre coût des pièces spectaculaires et d’apparence luxueuse.
Pionnier de la polychromie, Charles Cordier participe au renouveau de la sculpture sous le Second Empire. Cette paire de bustes, réalisée alors qu’il n’a que 25 ans, frappe par son originalité et sa maîtrise. Le bronze est doré, argenté et émaillé par le sculpteur lui-même. La paire connaît un immense succès et Cordier, qui est bon commerçant, la fait éditer en différents formats et matériaux : réductions en bronze uni et biscuits de Sèvres. Le pendant acquis par Orsay est l’exemplaire original.
Surfant sur le goût pour l’exotisme, le sculpteur tire le portrait d’un couple de Chinois qui sillonne alors l’Europe. Marchands de la province de Canton, Chung Ataï et son épouse Yun Achoi font le tour du continent pendant plus de deux ans, suscitant un engouement et une curiosité nourris puisque les gens paient même pour les rencontrer. Malgré le caractère stéréotypé des œuvres en raison des attributs – pipe à opium, chaussons et pagode –, l’artiste livre un portrait réaliste et incarné du couple.
Contrairement à nombre d’artistes de son temps, Charles Cordier développe une approche avant-gardiste puisqu’il n’exalte pas la supériorité supposée des Européens, mais magnifie au contraire la beauté de tous les types ethniques. Celui qui prêche « l’ubiquité du beau » est un farouche abolitionniste et est sensible à l’ethnographie alors naissante. Il se rend ainsi en Algérie, en Grèce et en Égypte pour réaliser des portraits vivants et nobles qui sont véritablement pionniers.
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Les bustes des Chinois de Charles Cordier
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°777 du 1 juillet 2024, avec le titre suivant : Les bustes des Chinois de Charles Cordier