PARIS
Le Palais Galliera a inauguré le 1er octobre de nouvelles salles qui permettront la présentation des collections. Pour l’heure, une exposition « Gabrielle Chanel », une première dans la capitale, ouvre le bal.
Paris. Moins spectaculaire que d’autres grands chantiers du plan de rénovation de ses musées mené par la Ville de Paris depuis 2015, l’extension du Palais Galliera constitue pourtant un jalon essentiel dans l’histoire de cet établissement et plus largement dans le paysage muséal de la capitale. Il aura en effet fallu un siècle pour que la Ville de Paris se dote d’un véritable Musée de la mode. Précisément depuis la donation fondatrice en 1920 de deux mille pièces par la Société de l’histoire du costume, sous l’égide de son président Maurice Leloir, ceci à la condition expresse que la municipalité crée un musée consacré à l’histoire du costume. Entre-temps, la collection a connu plusieurs terres d’accueil : le Musée Carnavalet, le Palais de Tokyo et, depuis 1977, le Palais Galliera. Toutefois, depuis son installation dans ce site, l’activité du musée s’apparentait davantage à celle d’un centre d’art car il n’était ouvert que lors des expositions temporaires. Faute de place, cette institution qui abrite l’une des plus riches collections au monde ne possédait pas d’espaces permanents dévolus à la présentation de ce fonds, riche de plus de 200 000 vêtements, accessoires, photographies et dessins. « Il y avait une attente très forte de la part du public de découvrir, outre les expositions temporaires consacrées à un créateur ou à une période, une histoire de la mode à travers nos collections, confirme Miren Arzalluz, directrice du Palais Galliera. L’objectif principal de la création de nouvelles galeries est justement de pouvoir présenter notre collection à travers un parcours permanent qui raconte une histoire de la mode depuis le XVIIIe siècle jusqu’à nos jours. »
Il faut dire que la richesse et diversité de ce fonds, qui retrace l’évolution de la silhouette depuis les habits de cour de l’Ancien Régime jusqu’aux créations contemporaines les plus extravagantes, permettent de développer des approches très variées. Et donc de renouveler régulièrement les accrochages, une problématique clef dans l’univers de la mode. Les collections étant par essence fragiles, il faut en effet imaginer des rotations tous les semestres pour des raisons de conservation préventive.
La première présentation semi-permanente sera dévoilée au printemps et portera sur l’histoire de la collection. Pour sa réouverture le 1er octobre, le musée a fait le choix d’une vaste exposition temporaire consacrée à Chanel, mécène exclusif qui a pris en charge l’essentiel des coûts du chantier. « Ces nouveaux espaces nous offrent davantage de souplesse, nous pourrons non seulement organiser de vastes présentations de la collection, mais aussi montrer en parallèle un accrochage semi-permanent et une exposition, et même des expositions de grande envergure qui occupent la totalité de l’espace. Même si cela reste exceptionnel… »
Véritable serpent de mer pour avoir été repoussée à de nombreuses reprises, la création de ces nouvelles salles, baptisées « Galeries Gabrielle Chanel », a permis de dégager 750 mètres carrés supplémentaires ; doublant ainsi la surface totale d’exposition. Aménagées en rez-de-jardin, elles offrent un tout autre visage que les salles du rez-de-chaussée, emblématiques du décorum des musées du XIXe siècle avec leurs murs rouge pompéien, leurs corniches sculptées, leurs plafonds peints et leurs sols en mosaïque dorée. Les nouvelles salles se prolongent dans les caves réinvesties, également en rez-de-jardin, autrefois dévolues au stockage et aux installations techniques. Les dispositifs de contrôle de la température, de l’hygrométrie et de la luminosité ont été dissimulés en sous-sol en tirant parti des fondations profondes creusées lors de la construction en 1878.
Libérées de ces installations, les caves offrent un bel espace propice à la contemplation et à la flânerie. Ces salles, dont le décor en brique rouge et pierre a été bichonné par des compagnons tailleurs de pierre, forment en effet un véritable cocon baigné d’une lumière douce, et recouvert d’un sol noir en liège conférant un confort acoustique.
À tout seigneur tout honneur. L’exposition de réouverture du Palais Galliera ne pouvait qu’être consacrée à la maison « mécène exclusif » du chantier de rénovation et d’extension. Et tant mieux serait-on tenté de dire. Car aussi surprenant que cela puisse paraître, il n’y avait jamais eu d’exposition rétrospective de Gabrielle Chanel (1883-1971), dite « Coco Chanel », dans la capitale ! Une étonnante lacune tant la créatrice est emblématique de la haute couture parisienne, et plus largement de la mode du XXe siècle. De manière exceptionnelle, le Musée de la mode de la Ville de Paris offre ainsi la totalité de ses espaces d’exposition à la fameuse inventrice du tailleur féminin. Le parcours, riche de 350 pièces, dont de nombreux prêts, retrace la carrière de Mademoiselle Chanel. La sélection pointue décrypte notamment les codes de la garde-robe Chanel et met en lumière ses années de jeunesse fort méconnues où émerge le vocabulaire formel qu’elle déclinera ensuite jusque dans les années 1960. Une exposition incontournable.
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La mode a enfin son grand musée à Paris
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°553 du 16 octobre 2020, avec le titre suivant : La mode a enfin son grand musée à Paris