L’archéologue Kent Weeks, professeur d’égyptologie à l’Université américaine du Caire, responsable du chantier ouvert par l’école américaine, fouille l’une des plus grandes tombes de la Vallée des Rois : celle des fils de Ramsès II, qui gouverna le Nouvel Empire égyptien de 1298 à 1253 av. J.-C.
PARIS - À partir de 1990, par mesure de conservation, et face au danger que représente le développement du tourisme en Égypte, Kent Weeks lance une campagne de cartographie du site archéologique de la Vallée des Rois. Sur les soixante-deux tombes du site, dont trente datent du Nouvel Empire, seules une ou deux ont été fouillées scientifiquement au moment de leur découverte. Peu de descriptions ont été publiées et peu de ces tombes ont été restaurées. À l’aide d’un matériel scientifique de pointe, l’équipe de l’égyptologue américain a établi des relevés très précis de toutes les tombes connues, prenant dans chacune de trois à cinq mille mesures afin d’en dresser un plan informatisé en trois dimensions.
Un sanctuaire atypique
Toutes les tombes accessibles sont recensées. Mais très vite, Kent Weeks constate qu’en moins d’un siècle, on a perdu la trace d’une demi-douzaine de tombes : certaines ont été utilisées par les archéologues pour évacuer les débris des fouilles, ou bien remplies de terre lors des violents orages qui s’abattent une ou deux fois par siècle sur la Vallée. C’est à partir de relevés anciens que l’égyptologue a retrouvé la tombe KV5 – il s’est fondé, entre autres, sur les résultats de la mission scientifique qui accompagnait le corps expéditionnaire de Bonaparte en 1798 et avait effectué une première prospection de la Vallée des Rois. Découverte au XIXe siècle par James Burton, qui y avait déchiffré le cartouche de Ramsès II, elle fut explorée à nouveau au début du XXe siècle par Howard Carter, l’inventeur de la tombe de Toutânkhamon. Weeks a également retrouvé et exploité des notes restées impubliées.
Kent Weeks en dégage l’entrée en 1994. Très vite il retrouve, face à celle de Ramsès II, une tombe traversée de couloirs, conduisant de part et d’autre à des chapelles d’offrandes. En décembre 1995, 95 chambres ont été exhumées.
La découverte de deux bas-reliefs représentant Ramsès II et ses fils, et des inscriptions sur des morceaux de poteries – le cartouche du premier fils de Ramsès II, Amon-Her-Kephesef, celui de son second fils Ramsès junior, le nom déchiffré de son septième fils Seti II, et de son quinzième fils, Mery-Amon – permettent d’affirmer que ce mausolée a été construit par Ramsès pour tous ses enfants. Pourquoi 95 ? La seule explication plausible est que Ramsès a eu 50 garçons et 50 filles (quatre d’entre elles sont ensevelies dans la Vallée des Reines).
La tombe KV5 comporte en son centre un grand hall de 17 mètres de côté, dont le plafond est soutenu par seize colonnes constituant une série de chambres. "L’entrée de ces chambres est d’environ 70 centimètres, trop étroite pour le passage d’un sarcophage. Ce ne sont donc pas des chambres funéraires mais des chapelles d’offrandes", conclut Kent Weeks. Elles suivent approximativement la forme d’un T et, tout au fond, se trouve un ensemble de petites chambres et une statue d’Osiris, le dieu des morts. Pendant les fouilles de décembre 1995, deux couloirs parallèles ont été dégagés. Ils se prolongent sous la route, plongent en profondeur et passeraient sous la tombe de Ramsès II. Les deux tombes ne semblent pas communiquer.
Mais l’inventeur précise : "Je pense maintenant que c’est dans ces couloirs, sur le côté droit – là où nous avons pour le moment dû interrompre les fouilles – que nous trouverons les chambres funéraires des personnages ensevelis ici. Aussi longtemps que nous n’aurons pas fouillé ces chapelles, nous ne pourrons pas proposer une explication sur leur fonction. C’est alors que nous pourrons déterminer par des techniques scientifiques (comparaison d’ADN, radiographie des corps, datation) qui est enterré dans ce sanctuaire". Seul le Sérapeum, nécropole construite à la même époque près de Saqqarah, ressemble à la KV5 et comprend deux niveaux : chapelles d’offrandes à l’étage supérieur et chambres funéraires au niveau inférieur.
La campagne de conservation sera elle aussi poursuivie dans les tombes de la Vallée. Tous les trois ou quatre ans, de nouvelles photographies seront prises et comparées aux précédentes afin de suivre leur état et celui des fresques, ainsi que tous changements structurels pour entreprendre les travaux de conservation.
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KV5 : la tombe des fils de Ramsès
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°23 du 1 mars 1996, avec le titre suivant : KV5 : la tombe des fils de Ramsès