Archéologie

Ramsès, pour l’éternité

Par Emmanuelle Vigier · L'ŒIL

Le 1 février 1999 - 531 mots

L’Égypte pharaonique est de mode. Et Ramsès II également dont la célébrité posthume, méthodiquement organisée de son vivant et régulièrement alimentée en France depuis l’exposition parisienne de 1975, continue de se nourrir des découvertes in situ. 

Depuis 1991 en effet, sous la houlette de l’Institut d’égyptologie thébaine et grâce au généreux mécénat d’Elf-Aquitaine, les fouilles ont repris à Thèbes-Ouest. Archéologues, épigraphistes, architectes, géologues et restaurateurs œuvrent à l’unisson avec l’intention ferme de lever les derniers mystères entourant la sépulture du « pharaon roux » ainsi que son immense temple mémorial, le Ramesseum – « le temple des millions d’années ». Avec déjà des résultats à la mesure des espérances. C’est en effet dans la Vallée des Rois, sous les trois mètres de sédiments qui comblaient la salle sépulcrale de Ramsès II, que les archéologues ont finalement retrouvé, brisé en quatre cents fragments, le sarcophage du souverain. En calcite, d’apparence anthropomorphe, il est orné du Livre des portes et se rapproche à plus d’un titre de celui de Séthi Ier – le père de Ramsès. Il reposait sur un luxueux catafalque dont quelques éléments de décor ont été mis au jour : deux imposantes têtes de guépard en calcaire, traitées en ronde-bosse et rehaussées de polychromie jaune-or. Autre découverte notable : un chaouabti, figurant Ramsès II sous l’aspect momiforme. On connaît plusieurs centaines de ces figurines, chargées de servir le pharaon après sa mort. Le spécimen récemment découvert révèle pourtant quelques spécificités remarquables, comme son matériau de provenance lointaine (aucun gisement d’anhydrite n’est connu sur le sol égyptien) ou sa facture particulièrement soignée.

Au Ramesseum, des découvertes non moins surprenantes attendaient les chercheurs. Dans la cour d’entrée du temple, les fragments des colosses de Ramsès II et de sa mère, Touy, ont fait l’objet d’une enquête approfondie. Ces deux statues monumentales n’auraient pas été détruites, comme on le supposait, par un tremblement de terre, mais leur fracture résulterait d’un abattage intentionnel dont les motivations restent encore à élucider. Égyptologues et ingénieurs EDF procèdent actuellement à une anastylose au laser restituant, en trois dimensions, l’image virtuelle de ces géants fracassés, qui atteignaient à l’origine une quinzaine de mètres et pesaient plus de mille tonnes. À la périphérie du temple, dans une zone actuellement cultivée, un relevé magnétique a révélé en outre l’existence de structures qui correspondraient aux installations portuaires ramessides, ou encore au grand portail qui précédait le pylône du temple. Plus loin, sous les maisons des paysans, ce sont les appartements royaux qui restent à explorer, comme l’ont confirmé de récents sondages.
De quoi nourrir encore l’appétit de plusieurs générations d’archéologues !

Les travaux en cours devraient se solder à terme par une vaste campagne de restauration et l’ouverture au public de la tombe royale. En attendant, l’exposition-dossier du Louvre fait le point sur cette riche moisson de données, et nous fait pénétrer au cœur du système politique et religieux de « l’une des plus étonnantes personnalités du monde de la Haute Antiquité », des mots mêmes de sa plus fidèle prêtresse, Christiane Desroches Noblecourt.

Musée du Louvre, 10 février-10 mai, cat. éd. RMN, 96 p., 80 ill., 120 F.
À consulter : Christiane Desroches Noblecourt/Michel François, Ramsès II, CD-rom, éd. Syrinx.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°503 du 1 février 1999, avec le titre suivant : Ramsès, pour l’éternité

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