La nature morte est-elle un genre pictural qui correspond à une réalité artistique, une sorte de catégorie indépendante qui traverserait l’histoire de l’art ? Peut-on la penser « pour elle-même » ? Telle était la question que posait Charles Stierling en 1952, dans le texte du catalogue qui accompagnait la magistrale exposition dédiée à ce sujet à l’Orangerie. L’analyse très approfondie que nous livre aujourd’hui Sybille Ebert-Schifferer résout partiellement cette interrogation classique.
Si la nature morte, constamment dépréciée et traitée comme un genre mineur depuis l’Antiquité – jadis parce qu’elle reproduisait de vils objets de la vie triviale, à présent pour son aspect « décoratif » – reste un sujet de prédilection des artistes de Chardin à Cézanne et de Matisse à Nicolas de Staël, c’est qu’elle endosse presque toujours, et avec quelle virtuosité, le poids du rapport fondamental qui lie l’homme à l’objet. Austère et mystique dans l’Espagne de Cotan ou dans les vanités hollandaises du XVIIe siècle, la nature morte est le support de l’affirmation sociale avant de devenir le prétexte à une révolution visuelle. Cette somme colossale s’enrichit même d’un chapitre inédit – à notre connaissance – sur la nature morte de la jeune nation américaine. L’iconographie, comme on pouvait s’y attendre, est somptueuse. Refermant l’ouvrage une seule question demeure : pourquoi peint-on des natures mortes ? Cette histoire fournit un élément de réponse : probablement pour dire cette fascination face à l’isolement de l’objet qui renvoie à la propre solitude de l’être humain.
Sybille Ebert-Schifferer, Natures mortes, éd. Citadelles & Mazenod, 420 p., 342 ill. dont 284 coul., 880 F, ISBN 2-85088-111-2.
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Sybille Ebert-Schifferer, Natures mortes
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°506 du 1 mai 1999, avec le titre suivant : Sybille Ebert-Schifferer, Natures mortes