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Rendez-vous avec Lucian Freud de Geordie Greig : un Freud insignifiant et impudique

Par Marie Rayevski · L'ŒIL

Le 27 janvier 2014 - 379 mots

Rendez-vous avec Lucian Freud de Geordie Greig comblera les amateurs de potins. Si l’artiste anglais protégeait sa vie privée au point de ne « pas donner son numéro de téléphone à tous ses enfants », l’auteur en fait peu de cas et livre sans manière la vie privée du peintre : « Il était marié à… Janetta Woolley.  Janetta eut une brève aventure avec Lucian ainsi qu’une longue liaison avec Cyril Connolly qui, à son tour, tomba amoureux de la deuxième femme de Lucian, Caroline Blackwood qu’il épousa en 1953. Janetta eut ensuite une liaison avec le duc de Devonshire… tandis que Lucian laissait entendre qu’il avait eu une aventure avec l’épouse du duc, Deborah Mitford, dont la sœur Pamela avait été la femme de Derek Jackson avant son mariage avec Janetta. Quarante ans après la brève aventure de Janetta avec Lucian, sa fille Rose fut sa maîtresse et posa pour lui. » La liste que dresse l’auteur des amants-maîtresses de Freud est absolument vaine.

En aucun cas elle n’éclaire l’homme, pas plus que l’artiste. Évidemment, la chair est au cœur du travail. Si Lucian Freud déclarait : « Je peins les gens, non pas à cause de ce à quoi ils ressemblent ni exactement en dépit de ce à quoi ils ressemblent, mais comme il se trouve qu’ils sont », c’est qu’il estimait qu’« une des choses les plus excitantes, c’est de voir à travers la peau, jusqu’au sang, aux veines et aux marques ». L’auteur semble prendre prétexte de la peinture de Lucian Freud pour dévoiler sa vie privée. C’est oublier que l’ambition de l’artiste était de « donner à l’art une indépendance complète par rapport à la vie, une indépendance qui est nécessaire parce que le tableau pour nous émouvoir ne doit jamais nous rappeler la vie, mais acquérir une vie propre, précisément afin de refléter la vie ». Lorsque l’on ne se perd pas dans le récit confus, on peut se réjouir de certaines citations, dont celles du critique Robert Hughes.

À une demande d’entretien que Geordie Greig avait faite à l’artiste quelques années avant l’ouvrage, ce dernier lui avait répondu : « L’idée de vous accorder une interview me fait vomir. » On se demande ce que Lucian Freud dirait aujourd’hui de ce livre.

Rendez-vous avec Lucian Freud de Geordie Greig - Éditions Christian Bourgois, 280 p., 25 euros

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°665 du 1 février 2014, avec le titre suivant : Rendez-vous avec Lucian Freud de Geordie Greig : un Freud insignifiant et impudique

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