Un ouvrage richement illustré propose une nouvelle lecture de l’art pictural antique
à l’échelle de l’intégralité du monde romain.
La bibliographie disponible sur la peinture romaine est encore à ce jour cruellement lacunaire. Plusieurs raisons expliquent ce silence relatif des spécialistes. L’importance des destructions a, d’une part, contraint les études à se concentrer sur les vestiges les plus significatifs, à savoir ceux de Pompéi et d’Herculanum, restreignant de fait la chronologie du IIe siècle avant J.-C. à la fin du Ier siècle de notre ère. Ces découvertes campaniennes ont toutefois permis, dès le XIXe siècle, à l’archéologue allemand August Mau de définir les quatre styles de la peinture romaine (Gestchichte der dekorativen Wandmalerei, in Pompei, Leipzig, 1882), encore utilisés aujourd’hui par les historiens de l’art. Ce vide archéologique a par ailleurs conforté l’importance de deux sources littéraires du Ier siècle, essentielles à la connaissance de l’art pictural romain : le chapitre V du livre VII du De Architectura de Vitruve et le livre XXXV de L’histoire naturelle de Pline l’Ancien. Ces textes ne sont toutefois pas dénués de jugements de valeur et affirment la primauté de la peinture grecque classique et l’existence d’une hiérarchie entre peinture de chevalet et fresques. Or depuis une trentaine d’années, plusieurs découvertes capitales en Macédoine et en Italie du Sud ont permis d’affiner sensiblement les connaissances sur la peinture du monde romain, dépassant le cadre géographique de la seule Campanie. De nouvelles discordances avec les sources écrites sont donc apparues à l’aune de ce corpus élargi.
Peinture romaine, ouvrage collectif rédigé sous la plume de trois professeurs d’archéologie italiens et d’une universitaire française, traduit de l’italien, se propose donc d’écrire une nouvelle histoire de la peinture romaine, tenant compte des découvertes récentes, notamment des tombes macédoniennes de Vergina. Bien avant Pompéi, ces sépultures de l’époque d’Alexandre le Grand (IVe siècle avant J.-C.), illustrant la transition entre l’art grec classique et l’art hellénistique, ont été ornées de fresques témoignant d’une grande capacité de restitution de l’espace et démontrant une maîtrise aboutie des effets de lumière. Si l’inspiration de la tradition grecque a perduré dans la peinture romaine – certains tableaux célèbres feront notamment l’objet de copies pariétales à l’époque augustéenne –, des phénomènes de régionalisation apparaissent. De même, la peinture quittera rapidement ce strict champ funéraire pour envahir l’univers domestique.
Sans remettre en cause les typologies de Mau, enrichies toutefois de styles de transition, l’ouvrage dresse un tour d’horizon complet des productions du monde romain. Le plan chronologique permet ainsi de suivre le fil de cette évolution au gré des provinces. Tous les exemples y sont finement analysés et accompagnés d’une iconographie parfois inédite. Il s’y dessine un univers pictural d’une richesse inouïe, qui voit l’apparition des premières peintures de paysage mais aussi de genres qui tendent à acquérir leur autonomie : natures mortes, portraits, scènes mythologiques…
Ida Baldassarre, Angela Pontrandolfo, Agnès Rouveret, Monica Salvadori, La peinture romaine, traduit de l’italien par Danièle Robert, éd. Actes Sud, 400 p., 44 euros, ISBN 2-7427-6216-7
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Réinvention de la peinture romaine
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°244 du 6 octobre 2006, avec le titre suivant : Réinvention de la peinture romaine