Plus qu’un « Cahier », c’est tout un monde qui renaît. Petite madeleine de Proust, dans le n° 1 de la 36e année des Cahiers d’art, est rééditée la conversation entre Zervos – fondateur de la revue – et Picasso.
Les idées fusent : « Le tableau n’est pas pensé et fixé d’avance. Pendant qu’on le fait, il suit la mobilité de la pensée. Fini, il change davantage, selon l’état de celui qui le regarde. Un tableau vit sa vie comme un être vivant […]. Cela est naturel puisqu’un tableau ne vit que par celui qui le regarde. » Le désir suscité d’en apprendre plus, attaquons le texte d’Yve-Alain Bois. Nous y lisons sur Ellsworth Kelly, à qui les Cahiers d’art consacrent leur numéro « renaissant » : « Il serait tentant, compte tenu de la morphologie austère des bannerstones, de leur absence de divisions internes et de leur aspect lisse et homogène, de rapprocher leurs formes et celles que Kelly exalte dans son art… Mais ce serait, je crois, faire fausse route : il protesterait alors… » Si le texte laisse sur sa faim, il questionne, notamment lorsque quelques pages plus loin, Ellsworth Kelly, interviewé par Hans-Ulrich Obrist, déclare au sujet des bannerstones qu’il collectionne : « Pour être exact, ces pierres ne furent pas dès l’origine une source d’inspiration… Ensuite, j’ai voulu que mon travail leur ressemble. » Une meilleure coordination des textes aurait été souhaitable.
Les Cahiers d’art semblent pécher par le contenu alors que la forme, luxueuse et superbe, réjouit. Le choix de jeunes artistes comme prolongement du travail de Kelly est lui aussi heureux. Pour ce qui est des photographies de Cyprien Gaillard, elles se seraient bien départies du texte de Jan Tumlir qui ne parle du travail de l’artiste qu’en effleurant le sujet. Le palmier : « Il convient dès lors d’interpréter le palmier comme le symptôme d’un progrès social en perte de vitesse. » Soit. Heureusement, les dessins d’Adrián Villar Rojas ne sont accompagnés d’aucun texte, ce qui laisse la place à l’énigme, à la découverte. Rappelons-nous qu’un « tableau ne vit que par celui qui le regarde ».
Hasard de l’édition, quelques mois après le lancement des Cahiers d’art, a été publié le n° 1 de la réédition de Camera, célèbre revue photographique. Là, une belle réussite. Le choix très judicieux de l’artiste célébrée, Françoise Huguier – enfin on ne parle pas toujours des mêmes ! –, réjouit tant par les propos que par le regard de la photographe – même si quelques photos peuvent dérouter par manque d’aiguillage. Mention particulière à la critique de livres !
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Rééditions : la forme d’une madeleine ne fait pas toujours son goût
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°657 du 1 mai 2013, avec le titre suivant : Rééditions : la forme d’une madeleine ne fait pas toujours son goût