CRITIQUE D’ART - Sans lui peut-être n’y aurait-il pas eu Baudelaire. Et sans Baudelaire, il ne resterait sans doute que lui.
Théophile Gautier (1811-1872), immense poète et brillant journaliste, fut également un puissant critique d’art, coincé entre Diderot et l’inventeur des Fleurs du mal. C’est donc lui rendre justice que de voir paraître parmi les rééditions de ses œuvres, en cette année de bicentenaire de sa naissance, trois ouvrages intéressés de très près aux beaux-arts.
Stéphane Guégan, critique d’art qui s’est distingué en 2011 avec son exposition « Manet » à Orsay, le rappelle dans l’impeccable biographie qu’il consacre à l’écrivain romantique (Gallimard) : « La critique d’art fut le premier emploi de Gautier à La Presse. » En 1836, lorsque le poète entre au journal dirigé par Émile de Girardin, il est déjà réputé pour sa fine plume et son gilet rouge qui fit jaser Paris lors de la première d’Hernani de Victor Hugo. Balzac, son contemporain et ami, le tient d’ailleurs en estime pour sa sagacité en matière d’art.
Il faut dire que le jeune critique, défenseur d’Ingres et de Delacroix, comme plus tard de Manet, à une époque où cela ne va pas de soi, sait son sujet sur le bout des doigts pour l’avoir exercé dans l’atelier de Rioult. Mais, comme il l’écrira en 1847, dans un très beau texte « Du beau dans l’art », présent dans l’actuelle réédition de son Art moderne (Fage), un recueil d’articles pour la première fois paru en 1856 : « Si vous n’avez pas la bosse, cherchez quelque honnête métier […] ; mais, croyez-m’en, ne passez jamais votre pouce dans le trou d’une palette. » Et son pouce avait finalement préféré la plume. Une plume descriptive et analytique, à laquelle l’histoire reprochera de ne pas mordre davantage comme le fait si bien celle de Baudelaire.
C’est que, « même quand il n’aime pas, Gautier essaie de comprendre », analyse l’universitaire Olivier Schefer dans son introduction à L’Art moderne. Question d’approche donc. De précision aussi : « Cela n’est pas même détestable ; un mot entre nul et académique […] serait ce qu’il faudrait », écrit-il à propos d’un dessin de Girodet. Aussi son écriture n’est-elle jamais aussi pleinement entière que lorsqu’il déambule dans le Louvre de 1866, répondant à la commande d’un guide sur Paris écrit « par les principaux écrivains et artistes de la France » et que l’on prend plaisir à relire dans sa réédition superbement illustrée (Citadelles & Mazenod).
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Pour l’anniversaire de Théophile Gautier
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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°639 du 1 octobre 2011, avec le titre suivant : Pour l’anniversaire de Théophile Gautier