Gallimard édite dans la Pléiade ses « Écrits sur l’art », complétés de documents inédits.
« Si nous devions emporter en un volume tout l’art du monde, ses œuvres et sa signification, quel livre choisir sinon celui-ci ? Un homme y a condensé quarante ans de vie au milieu des chefs-d’œuvre des cinq continents, de lectures, de réflexion au contact des plus grands. Non pour les raconter, les critiquer ; mais pour les faire vivre et nous les faire aimer. » C’est en ces termes élogieux que Jean-Yves Tadié introduit le lecteur aux Écrits sur l’art d’André Malraux, tomes IV et V des Œuvres complètes de l’écrivain, parues aux éditions Gallimard dans la Pléiade. Ces deux volumes rassemblent les ouvrages publiés en librairie, accompagnés de leurs illustrations (plus de 1 200 au total) et complétés par des textes parfois inédits, des préfaces, des articles ou des allocutions. Le premier couvre la période 1922-1954, depuis l’Esquisse d’une psychologie du cinéma (1946) et Saturne. Essai sur Goya (1950, version corrigée par Malraux en 1975) jusqu’à la trilogie du Musée imaginaire de la sculpture mondiale (1952-1954).
Au cœur du volume, on retrouve Les Voix du silence (1951), rééditées ici pour la première fois depuis cinquante ans. « Un crucifix roman n’était pas d’abord une sculpture, la Madone de Cimabue n’était pas d’abord un tableau, même la Pallas Athénée de Phidias n’était pas d’abord une statue. » Ainsi débutent Les Voix du silence, avec la théorie du Musée imaginaire. Libérées du lieu d’exposition et de la collection, les œuvres d’art existent en tant que telles et peuvent être confrontées les unes aux autres. Au fil des pages, Botticelli fait face à Piero Di Cosimo, Filippo Lippi à Léonard, Goya à Manet, Magnasco à Delacroix… Les rapports étroits qu’entretiennent deux images placées face à face constituent un élément essentiel du système de pensée de Malraux, de même que la concordance entre le texte et la reproduction. Si le format de la Pléiade empêche d’appliquer à la lettre ces notions fondamentales, tout a été mis en œuvre pour les respecter : la place des images correspond dans la mesure du possible à celle occupée dans les chapitres initiaux ; elles ont été réduites sans effacer l’idée de leurs dimensions réelles.
Le second recueil (1955-1976), essentiellement consacré à La Métamorphose des dieux, est paru un mois avant la mort de Malraux. En appendice figurent des fragments qu’il destinait à cette trilogie mais finalement supprimés, notamment le chapitre de l’« Irréel », mené jusqu’au stade de la maquette illustrée. Un vrai « bonus » pour redécouvrir l’œuvre de celui qui fut aussi le premier ministre aux affaires culturelles.
(Œuvres complètes, t. IV et V), éditions Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, Paris, 2004, premier volume, 1 680 p., 60 euros (puis 67 euros à partir de mars 2005), deuxième volume, 1 856 p., 65 euros (puis 73 euros). À lire également aux éditions Gallimard : Henri Godard, L’Expérience existentielle de l’art, 144 p., 12 euros (essai en marge des Écrits sur l’art de Malraux) ; André Malraux. La tentation de l’Inde, 272 p., 25 euros (textes réunis et présentés par Jean-Claude Perrier).
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Les voix de Malraux
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°203 du 19 novembre 2004, avec le titre suivant : Les voix de Malraux