En 1888, un groupe de jeunes artistes se réunit sous l’appellation de “Nabis”? (“prophètes”? en hébreu). Paul Sérusier, Maurice Denis, Pierre Bonnard, Félix Vallotton, Aristide Maillol, Édouard Vuillard, Paul Ranson, Georges Lacombe et József Rippl-Rónai furent, entre autres, les “prophètes”? de cette nouvelle peinture. Paru chez Flammarion, un ouvrage de référence met en lumière la variété de leur production et l’audace de leurs créations.
Les Nabis sont décidément d’actualité. Sept mois avant la grande rétrospective “Vuillard” au Grand Palais, à Paris, et peu de temps après la sortie du livre de Claude Jeancolas La Peinture des Nabis, un nouvel ouvrage est consacré à ce groupe d’artistes. Un de plus ? Le volume de Claire Frèches-Thory, conservateur au Musée d’Orsay, et d’Antoine Terrasse, petit-neveu de Pierre Bonnard et spécialiste du post-impressionnisme, a une autre portée. Il s’agit tout d’abord, dix ans après l’exposition du Grand Palais, du premier ouvrage présentant l’œuvre des Nabis dans toute sa diversité. Comme il est écrit dans l’avant-propos, “ces artistes, qui se voulaient aussi des artisans, souhaitèrent [...] ‘intégrer l’art à la vie’. Qu’il s’agisse de tout l’intérieur de la maison. Mais aussi du théâtre. De l’illustration de livres et de revues. De l’affiche et de l’estampe”. Au fil des huit chapitres, l’ensemble des pans de leur production est ainsi analysé, des peintures de chevalet aux grands panneaux décoratifs, en passant par les programmes de théâtre, la sculpture, la création d’éventails ou de paravents. Précédant cette approche par grands domaines artistiques, deux parties rappellent l’histoire de la constitution du groupe ainsi que la biographie des peintres qui le composent. Écrites par Antoine Terrasse, elles sont tout simplement remarquables. Dans une langue très vivante, l’auteur évoque l’effervescence artistique du Paris de la fin des années 1880 et replace les expérimentations, les “échanges et les querelles” des Nabis dans le contexte de l’époque. Ainsi du célèbre paysage du Bois d’amour (Le Talisman) peint par Sérusier sous la dictée de Gauguin. “Qui aurait pu penser qu’il prendrait un jour une telle place dans l’histoire de la peinture ?, écrit l’historien de l’art. Il faut le situer en son temps, en 1888, et l’imaginer parmi tous les tableaux académiques de cette époque, ceux de Luc-Oliver Merson, de Jules Lefebvre, de Debat-Ponsan ou de Bouguereau, qu’on pouvait voir dans les Salons officiels avec ceux de Cabanel et de Rochegrosse.” Sont également mises en lumière la sensibilité visionnaire et la curiosité multiforme des membres du groupe. “C’est tout à l’honneur de cette génération d’artistes d’avoir pressenti l’intérêt de ces œuvres [La Vision après le sermon de Gauguin, les toiles de Cézanne et de Van Gogh] et de ces expériences. Ils furent aidés ici par une intelligence ouverte à tous les aspects de la vie de l’esprit”, constate Antoine Terrasse. Leur rayonnement n’en a été que plus grand, comme il est montré en dernière partie de l’ouvrage. Enfin, la richesse et l’originalité de la sélection iconographique méritent d’être soulignées. Les œuvres peu connues sont en effet privilégiées, permettant ainsi au lecteur d’admirer nombre de créations conservées dans des collections particulières. Seule ombre au tableau, le prix un peu excessif de ce très beau livre...
Les Nabis, Claire Frèches-Thory, Antoine Terrasse, Paris, éditions Flammarion, 2002, 320 p., 90 euros. ISBN 2-08-011063-2.
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Les Nabis sont à nouveau de sortie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°165 du 21 février 2003, avec le titre suivant : Les Nabis sont à nouveau de sortie