Le « Visage » du temps

L’histoire est celle d’un film dans le film. Un réalisateur taïwanais, personnage fortement inspiré par la figure de l’auteur, vient tourner la chronique du mythe de Salomé dans les galeries du Musée du Louvre. Mais les problèmes s’accumulent. Le cinéaste perd sa mère. La productrice doit le rejoindre à Taïpeh pour les obsèques et attendre la fin de son deuil. Le tournage ne reprendra qu’après que chacun se sera égaré dans les sous-sols du Louvre, et nous aura fait partager son errance. Tsai Ming-Liang, dont le cinéma se réfère à François Truffaut ou Robert Bresson, décline dans Visage les thèmes de la vie, la mort et la solitude. Mais le sujet est toujours traité avec distance et humour, comme en témoigne l’épopée du renne, le sympathique Zizou, dans Paris.
    Le temps reste le fil conducteur du film. Tsai Ming-Liang le capte par le truchement des visages de son impressionnante brochette d’acteurs : Jean-Pierre Léaud, Lee Kang-Sheng, Laetitia Casta, Fanny Ardant, Jeanne Moreau, Nathalie Baye ou encore Mathieu Amalric. Le réalisateur explore le monde intérieur de ses personnages dont les égarements, entre monde réel et vie imaginaire, soulignent la vacuité de la condition humaine. L’esthétique du  film évoque les toiles conservées au Musée du Louvre, qui est lui-même le théâtre discret des doutes de ces personnages.