Le Prix du Livre d’Art d’Ajaccio s’enracine 

Ogres cornus à peau rouge, fantômes aux cous démesurément longs, théière prenant vie… Les Yōkai, des créatures et esprits surnaturels issus du folklore japonais, peuplent l’ouvrage lauréat du Prix du Livre d’Art organisé au Palais Fesch, abritant le musée des Beaux-Arts d’Ajaccio, le 24 juin dernier. 

Yōkai, créatures et esprits surnaturels au Japon, est consacré à la collection de l’ancien conservateur du Kawasaki City Museum, Koichi Yumoto. « Ce féru d’art a rassemblé, tout au long de sa vie, des œuvres japonaises depuis la période Edo [qui débute au 17ème siècle, NDLR] jusqu’à nos jours », explique Aude Mantoux, directrice éditoriale aux éditions de La Martinière en charge du pôle Beaux Livres. « Il s’agit d’un livre où l’on s’immerge dans les œuvres, grâce à des détails et des gros plans, ce qui permet de s’immerger complètement dans cet univers graphique », précise-t-elle.

C’est sans doute ce point qui a séduit le jury, dont fait partie Marielle Pic, archéologue et ancienne directrice du département des Antiquités orientales au Musée du Louvre. « Les images doivent être de bonne qualité : un Poussin avec les mauvaises couleurs ça ne peut pas fonctionner ! On s’attache beaucoup au graphisme », confirme-t-elle. 

En plus de la catégorie « livre d’art », un catalogue d’exposition est également distingué. Cette année, c’est celui de La Haine des Clans, Guerres de religion en France (édité par In Fine), une exposition visible au Musée de l’Armée de Paris, qui a été récompensé par le jury.

Une récompense ancrée en Corse, mais au rayonnement national

Cette réunion d’experts prestigieux (en fait notamment partie Laurence Des Cars, présidente-directrice du Louvre, Marie-Christine Labourdette, présidente du Château de Fontainebleau, ou encore Sophie Makariou, ex-présidente du musée des Arts asiatiques – Guimet et désormais directrice scientifique d’AFALULA), la même chaque année, est bien ce qui rend unique le Prix du Livre d’Art d’Ajaccio. « Philippe Costamagna, le conservateur du palais Fesch, souhaitait créer un jury d’exception. La présence de chaque juré est justifiée par sa connaissance d’une période », explique Mychèle Leca, directrice et conceptrice des rencontres littéraires Racines de Ciel, prenant place en Corse depuis 15 ans. « Avec un tel jury, on ne pouvait faire qu’un prix national, et non pas orienté sur la Méditerranée ou la Corse », ajoute-t-elle. 

Malgré cela, l’île de beauté soutient pleinement le prix, la ville d’Ajaccio allouant chaque année 3 000 euros à son lauréat. Avec l’appui de la DRAC de Corse et du ministère de la Culture, la manifestation s’est aussi enrichie, cette année, d’un prix du livre d’art des jeunes : des adolescents de la région, bénéficiaires du Pass Culture, sont désormais eux aussi invités à sélectionner un ouvrage. Cette année, leur préférence est allée au catalogue d’exposition Le Voyage en Italie de Louis Gauffier du Musée Fabre de Montpellier, édité par Snoeck. 

Une façon, pour l’association Via Grenelle, porteuse du projet Racines de Ciel, et les pouvoirs publics locaux, de faire rayonner la Corse et sa jeunesse sur le plan national.