Les éditions Gallimard éditent les travaux des historiennes
Anne-Marie Lecoq et Laurence Bertrand Dorléac.
Lancée en 1991 au sein des éditions Gallimard par Jean-Loup Champion, la collection « Art et artistes » s’enrichit de deux nouveaux titres. Historienne des idées, ingénieure de recherche au Collège de France où elle travaille auprès de Roland Recht dans le cadre de la chaire d’Histoire de l’art médiéval et moderne, Anne-Marie Lecoq s’attaque à l’un des grands textes de la littérature antique : le récit de la fabrication du bouclier d’Achille, soit 130 vers du chant XVIII de l’Iliade. Homère y raconte comment le dieu Héphaïstos crée pour Achille une arme protectrice, sur laquelle sont forgés des éléments cosmiques, des scènes de la vie quotidienne ou de guerre, mêlant des animaux, hommes et dieux.
« L’astre du bouclier d’Achille jette toujours dans notre imagination son obscure clarté, née quelque part dans le monde grec il y a sans doute maintenant vingt-huit siècles. Le moment était venu, m’a-t-il semblé, de rappeler son rôle et de marquer sa place dans l’histoire européenne des idées », précise en préambule l’ancienne collaboratrice d’André Chastel et de Marc Fumaroli. Comme le montre cette passionnante enquête, le bouclier n’a cessé de fasciner théoriciens, historiens et critiques, anciens et modernes. Après avoir analysé, et écarté, les principales interprétations dont cette œuvre d’art fictive a fait l’objet, Anne-Marie Lecoq en donne sa propre version, mettant en évidence les liens étroits unissant l’art à la magie.
« Liberté étrange »
Dans un tout autre genre, le second ouvrage aborde la création artistique en France au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Il s’agit d’une compilation de trois textes publiés par l’historienne de l’art Laurence Bertrand Dorléac entre 1996 et 2006 : « La joie de vivre et après », rédigé pour le catalogue de l’exposition « 1946, L’art de la reconstruction » présentée au Musée Picasso, à Antibes, sous la direction de Maurice Fréchuret ; « L’art de la reconstruction », un texte publié dans L’Année 1947, un ouvrage dirigé par Serge Berstein et Pierre Milza. Enfin, « L’expressionnisme en point aveugle de l’histoire de l’art » contribue à une Réflexion sur l’histoire de l’art franco-allemande après la Seconde Guerre mondiale, préfacée par Thomas W. Gaehtgens, publié par Martin Schieder et Isabelle Ewig.
Membre de l’Institut universitaire de France et professeur à Science Po où elle occupe la chaire Histoire de l’art et politique et dirige le séminaire « Arts et Société », Laurence Bertrand Dorléac rejette le terme de « reconstruction » qui s’est imposé pour décrire cette époque pétrie des doutes, traumatismes et du désenchantement qu’exprime, dans sa grande diversité, la scène artistique française. L’auteure cherche à « montrer à quel point ces années sont dominées par une forme de liberté étrange où l’art n’a plus à respecter quoi que ce soit après avoir failli disparaître ».
À la lumière du contexte de l’immédiat après-guerre qui voit triompher le parti communiste, elle propose d’aborder autrement les œuvres de Léger, Picasso, Giacometti, Tal Coat, Jean Bazaine ainsi que les artistes de l’Art concret, de la non-figuration, ceux exposés au Salon des réalités nouvelles en 1946 ou encore Olivier Debré, Soulages, Fautrier, Henri Michaux et Dubuffet… Autant de personnalités qui peuvent « incarner toutes les France de l’après-guerre : joyeuse, libre, optimiste, oublieuse, endeuillée, rationnée, douloureuse ». Le troisième texte est une réflexion sur la manière dont l’histoire de l’art s’écrit, sans jamais vraiment parvenir à échapper à l’imaginaire collectif.
Anne-Marie Lecoq, Le bouclier d’Achille, éd. Gallimard (coll. « Art et artistes »), Paris, 2010, 400 p., 30 euros, ISBN 978-2-07-076588-1.
Laurence Bertrand Dorléac, Après la guerre, éd. Gallimard (coll. « Art et artistes »), Paris, 2010, 162 p., 25 euros, 978-2-07-012742-9.
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L’art en questions
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°326 du 28 mai 2010, avec le titre suivant : L’art en questions