Il fallait un livre-objet comme Taschen ose les faire pour fabriquer une monographie digne de la démesure de Jeff Koons.
On connaît déjà beaucoup de choses sur la vie de cet artiste hors normes : son passé de trader, ses frasques avec la Cicciolina, ses œuvres monumentales et kitsch, son physique de gendre idéal, sa cote exorbitante, son côté yankee. Tout cela est vrai et dresse de l’intéressé un portrait en apparence peu flatteur. Mais tout dépend de la lecture que l’on fait de ces clichés. Car le bougre est mal aimé. Les ignorants disent que son œuvre n’est pas de l’art, tandis que les sachants ne le trouvent pas assez artiste. Lui n’en a cure, le richissime François Pinault le collectionne et cela suffit à son portefeuille et à son besoin de reconnaissance.
Cette monographie autorisée est forcément flatteuse sans être hagiographique. Même si elle laisse une large place à l’œuvre avec de remarquables illustrations, elle permet de mieux comprendre Koons. Est-il intéressé par l’argent ? Oui, comme presque tous les artistes. Est-il cupide ? Non, sa démesure l’a conduit à la faillite en 1996. S’il se met volontiers en scène, il n’est ni égocentrique ni arrogant comme tant de ses confrères. Il a été courtier en matières premières pour financer ses productions, mais aussi stagiaire au MoMA. Son mariage avec Ilona Staller s’est terminé deux ans plus tard avec la fuite de la Cicciolina avec leur fils. Américain, il aime l’Europe et y a séjourné et exposé plusieurs fois.
Reste le plus important, son œuvre : clinquante, facile, littérale, conçue par lui, mais fabriquée par des artisans. Ces caractéristiques lui enlèvent-elles de la valeur ? Koons s’en explique. Pour lui, l’art doit être un mode de communication positif. Il veut que ses sculptures et tableaux soient compréhensibles par tous et aident les gens à prendre confiance dans l’art. Imposture ou profession de foi ? À chacun d’en décider. Puppy, Balloon Dog, Rabbit, Le Homard, autant d’œuvres immédiates et séductrices qui forment une œuvre cohérente, forte et singulière. L’ouvrage rappelle par ailleurs que Koons s’inscrit dans deux courants de l’art moderne : les ready-made de Duchamp et l’esthétique léchée de Dalí.
Cette somme souffre d’un seul défaut, les textes sont trilingues au bénéfice des textes anglais pour la correspondance image-texte. Mais cela permet d’abaisser les coûts de production et de la vendre très bon marché.
Hans Werner Holzwarth (sous la dir. de), Jeff Koons, Taschen, 592 p., 50 €.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Hans Werner Holzwarth (sous la dir. de) : "Jeff Koons"
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°614 du 1 juin 2009, avec le titre suivant : Hans Werner Holzwarth (sous la dir. de) : "Jeff Koons"