Les deux foires marseillaises ont fermé leurs portes sur des notes différentes.
Pour la première fois, les dates des trois manifestations, du 30 août au 1er septembre, étaient exactement identiques, et une navette circulait de l’une à l’autre. Art-o-rama passe encore pour une jeune manifestation, bien que cette édition ait été sa 18e. Cette image tient en partie aux murs tagués de La Friche de la Belle de mai, où elle loge depuis 2021. Les galeries Suzanne Tarasiève et Georges-Philippe et Nathalie Vallois, qui participaient pour la première année, sont ainsi venus y chercher ce petit cachet décalé.
Pourtant, avec une sélection de 42 galeries d’art et de design et 18 éditeurs, Art-o-rama n’a plus grand-chose à voir avec sa version d’origine, très radicale : celle-ci comptait moins d’une dizaine de galeries retenues pour des projets curatoriaux que le salon, ouvert pendant 15 jours, produisait en grande partie. L’aspect commercial ne primait pas. « Les ventes ne sont pas le point fort d’Art-o-rama », reconnaît son directeur Jérôme Pantallacci.
Cela semble se vérifier cette année encore, bien que les prix pratiqués demeurent sur la plupart des stands en deçà de 10 000 euros ; à quelques exceptions près, par exemple la sculpture-meuble de Julien Berthier, empilement de rochers en résine « kitsch et cool » sur le stand de Georges-Philippe et Nathalie Vallois (38 000 euros). Ou les créations florales d’Anna Zemànkovà, figure de l’art brut que la galerie Sophie Tappeiner (Vienne), qui sera dans quelques semaines à Art Basel Paris, a souhaité faire dialoguer ici avec la création contemporaine (entre 8 000 et 13 000 euros).
Peu importe les ventes, puisque « tout le monde passe sur la foire », assurent les galeristes : responsables d’institutions, locales, ou nationales tel Xavier Rey, directeur du musée national d’art moderne – Centre Pompidou, commissaires, collectionneurs « français, mais aussi belges, sans compter de nombreux italiens », assure Jérome Pantallacci. Le positionnement d’Art-o-rama est international ; on y voyait d’ailleurs pour la première fois (au milieu des galeries venues d’Allemagne, d’Autriche, du Canada, des États-Unis, d’Espagne, de Lituanie, de Londres…) une galerie du cru, Sissi Club, auparavant sélectionnée à List, à Bâle. « Dès le départ, l’idée était de dynamiser le territoire », explique Jérôme Pantallaci.
En grandissant, Art-o-rama ressemble de plus en plus à une foire classique ; Chiquita Room présentait de délicates aquarelles abstraites de Laura Zuccaro. sans titre (Paris) partageait son espace avec Union Pacific (Londres) et dévoilait le travail de sculpture sur bois du jeune artiste Wei Libo, aussi décoratif que conceptuel. Une pléthore de prix, pour la plupart des prix d’acquisition, sont décernés durant le week-end : le prix Pébéo pour la peinture a été remis au trio d’artistes iraniens Rokni Haerizadeh, Ramin Haerizadeh & Hesam Rahmanian, défendu par IIn Situ fabienne leclerc (Romainville). Le prix Roger Pailhas, décerné par le salon en mémoire du galeriste marseillais, et qui récompense le projet curatorial le plus audacieux par le remboursement des frais de participation, a été remis à Zyrland Zoiropa (Berlin), qui présentait les œuvres sur papier de Liam Allan et les « sculptures mixtes » de Burkhard Beschow, convoquant la notion d’archives et la mémoire des lieux. « Les gens viennent voir des installations un peu folles sur Art-o-rama, puis ils vont à Paréidolie acheter un dessin », assurait un galeriste habitué des deux foires.
Cette prophétie se vérifie sur place : au « château de Servières », dès les premières heures, les points rouges signalaient sur les cimaises de nombreux stands les premiers achats. Paréidolie maintient son cap : offrir aux amateurs un panorama du dessin contemporain dans une quinzaine de galeries. « Sept galeries qui étaient déjà présentes l’an dernier, six nouvelles et trois qui reviennent », résume Martine Robin, la directrice de la foire. Toutes les explorations graphiques s’y donnent à voir : figuratif (Edi Dubien chez Alain Gutharc) surréaliste (Céline Marin présentée par Husk gallery), conceptuel (Marine Pagès défendue par Bernard Jordan), cosmique (Caroline Tschumi chez Laurent Godin), intemporel (Charles-Elie Delprat, à la galerie Ingert).
Enfin Polyptique, dédié à la photographie contemporaine sur un format de poche (neuf galeries), monte en gamme en optant désormais pour un rythme biennal. Et pour retrouver l’esprit pionnier d’Art-o-rama, c’est désormais au palais Carli, où Systema se déploie à l’écart des modèles de foire traditionnels, que l’on va faire un tour.
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« On visite Art-o-rama et on achète à Paréidolie »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°638 du 6 septembre 2024, avec le titre suivant : « On visite Art-o-rama et on achète à Paréidolie »