L’engouement pour ce produit emblématique de l’art de vivre à la française ne se dément pas malgré la crise sanitaire. Car le vin attire à la fois les amateurs et les investisseurs.
Un millésime d’exception à s’offrir pour Noël ? Aux enchères, il n’y a que l’embarras du choix : la plupart des maisons de ventes organisent des vacations dédiées au vin même si une poignée d’entre elles réalisent les deux tiers du marché : le leader, International Wine Auction, mais aussi Besch, Artcurial, Tajan, Arcadia et Lombrail Teucquam. Le marché des vins aux enchères pèse très peu par rapport à la vaste production viticole française (moins d’une cinquantaine de millions
d’euros par an), mais il est actif et attire les nouvelles générations. Selon Olivia Dumont-Maillard, qui a réalisé l’expertise de la cave exceptionnelle dispersée les 24 et 25 octobre chez Actéon à Senlis, « les belles choses partent très bien. Cela signifie, les grands crus, les belles années et une parfaite conservation. » Selon elle d’ailleurs, « la crise sanitaire n’a pas impacté les ventes de vins dans lesquelles les acheteurs enchérissent principalement en live. L’essentiel est de bien décrire et photographier les lots, de détailler l’état des capsules, des bouchons, la couleur du vin en transparence… » De fait, près de 300 ventes par an sont totalisées sur les plateformes Drouot Digital ou Interenchères !
Même constat chez Catawiki : « Nous avons organisé la première vente aux enchères de vins en 2012. En 2020, nous en avons plus de trente-cinq chaque semaine, sur des thèmes comme les vins espagnols et portugais, le champagne, les 100 points Parker, les vins Gaja, les vins exclusifs… Ces dernières années, la catégorie a connu une très forte croissance, avec de plus en plus d’acheteurs et de vendeurs qui se tournent vers des solutions en ligne, fiables et simples d’utilisation », souligne Daniel Elswood, expert vins et whisky de Catawiki, dont l’équipe de quatorze personnes devrait s’agrandir prochainement. Et il y en a pour tous les goûts et bourses. « Notre offre couvre des premiers prix d’entrée aux bouteilles à 20 000 euros et plus, jusqu’aux collections uniques de plus de 50 000 euros », poursuit Daniel Elswood. Chez Interenchères qui écoule 90 000 lots par an, le panier moyen sur les ventes effectuées de janvier à septembre est de 167 euros.
Quelles sont les tendances marquantes ? Avec l’engouement pour le bio, la cote des vins « naturels », issus de vignes travaillées sans pesticide ni engrais chimique, a doublé en trois ans. De même, les bourgognes attirent une clientèle du monde entier, avec en tête les Romanée-Conti, et dépassent les bordeaux, avec des prix multipliés par quatre en une décennie ; contrairement aux crus bordelais depuis longtemps répertoriés par château et millésime, les vins bourguignons laissent plus de place à la découverte. Enfin, les vins anciens enregistrent des records : un vin jaune de 1774 a ainsi été adjugé 85 000 euros en 2018 ; il s’agissait de la plus vieille bouteille en circulation.
État de conservation de la bouteille et de l’étiquette, bonne provenance (cave d’un amateur ou d’un collectionneur) et vin encore consommable sont autant d’éléments auxquels sont sensibles les investisseurs. Car le vin est aussi un placement. « Le produit étant relativement sûr lorsqu’il est conservé dans de bonnes conditions, il reste un investissement stable », note Daniel Elswood. Chez Christie’s, qui se concentre sur le haut de gamme, on connaît bien cette clientèle aisée, où la dimension placement est appréciée. « Nous sommes positionnés sur les vins rares, les millésimes anciens, il y a une clientèle pour cela, pas du tout impactée par la crise et qui est certaine de pouvoir revendre avec une plus-value ; nous avons écoulé 90 % de nos lots cette année ! », constate Pablo Huarte, le spécialiste vin de la maison. Cet expert réalise quinze ventes de 500 à 600 lots par an, rapportant à chaque fois environ 2 millions d’euros, dont l’une réalisée intégralement en ligne.
En mars, à la veille du confinement, la vente des Hospices de Nuits-Saint-Georges au château du Clos-Vougeot a elle aussi fait un carton : malgré le coronavirus ayant entraîné l’absence d’importants acteurs internationaux, malgré la taxe Trump sur les vins français et malgré une baisse du nombre de lots, la 59e édition de cette vacation culte a affiché un résultat en hausse de 9,5 % par rapport à celui de 2019, avec un total de 1,6 million d’euros pour 123 pièces, dont un premier cru adjugé 24 000 euros.
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Vin aux enchères, un marché juteux
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°739 du 1 décembre 2020, avec le titre suivant : Vin aux enchères, un marché juteux