La France, terre des arts…, a perdu sa place de référence absolue pour les artistes du monde, sa prépondérance dans la création contemporaine parce qu’elle ne respecte plus ses créateurs, et sa prééminence sur le marché de l’art parce qu’elle méprise celui-ci.
Ce constat, le rapport Quemin, commandé par le Quai d’Orsay, en fait l’amère démonstration, et il est donc logique que la réforme du statut des commissaires-priseurs ait été retardée, à de nombreuses reprises, pendant que les grandes maisons anglo-saxonnes – dirigées par de brillants financiers – construisaient leurs hôtels et établissaient leurs réseaux, de manière à être prêtes à démarrer au moment où l’administration donnerait enfin aux commissaires-priseurs français la permission de commencer à s’organiser en sociétés commerciales. Cette réforme était indispensable et souhaitable pour l’ensemble du marché français… mais pourquoi intervient-elle si tard ?
Cette réforme ne résout aucun des problèmes qui freinent le marché français : la TVA à l’importation – taxe handicapante, qui empêche les œuvres d’art d’entrer en France et d’enrichir notre patrimoine –, le droit de suite qui envoie la vente Gaffé à New York, la fiscalité, qui n’encourage ni les collections privées, ni les collections d’entreprise, bref, une réforme qui régente sans dynamiser. Les maisons étrangères qui s’installent, qui sont nos concurrentes et non nos adversaires, ont la chance de pouvoir résoudre à l’étranger les problèmes que leur posent les contraintes de la réglementation française.
La civilisation dans laquelle nous entrons est celle du savoir, et la France est un pays de créateurs, un gisement d’inventeurs et de savoir-faire. Notre survie va dépendre de la clairvoyance avec laquelle nos futurs dirigeants vont comprendre que le génie de la France est celui de ses créateurs, que les richesses proviendront de notre matière grise, et que celle-ci risque de s’amenuiser ou de s’expatrier si nous ne la respectons pas. La France est un pays merveilleux… mais si mal aimé par ses dirigeants.
Pierre Cornette de Saint Cyr, commissaire-priseur
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Une réforme trop tardive
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°132 du 14 septembre 2001, avec le titre suivant : Une réforme trop tardive