Agrémentés par le Conseil des ventes crée l’été dernier, les commissaires-priseurs ont maintenant
leur syndicat, le Symev, dont les vues sont nettement plus radicales. Va-t-on vers un conflit entre ces deux organismes ?
PARIS - Ingérence étatique d’un côté, corporatisme de l’autre ? À première vue, la création en France non seulement d’un Conseil des ventes mais également d’un Syndicat national des maisons des ventes volontaires (ou Symev) alourdit un marché fraîchement reformé avec de nouvelles contraintes bureaucratiques.
Le Symev s’est créé le 19 novembre, en grande partie en réaction contre le Conseil des ventes, et à l’instigation du commissaire-priseur parisien Hervé Poulain, de l’étude Poulain-Le Fur, qui en a aussitôt été élu président. Le Syndicat, qui devra tenir sa première assemblée générale au printemps, se compose de 30 membres fondateurs dont : Dominique Ribeyre, le président de la Chambre nationale des commissaires-priseurs (et accessoirement de Drouot) ; les présidents des neuf compagnies régionales et de Paris ; le président du Syndicat des commissaires-priseurs de province ; “les opérateurs les plus significatifs de Paris et de province” ainsi que des représentants de Christie’s et Sotheby’s – à savoir leurs directeurs, François Curiel et Laure de Beauvau Craon, qui siègent aussi au Conseil des ventes.
Pourquoi un Syndicat ? D’abord, explique Hervé Poulain, “parce que le Conseil est bidon. Il est composé de gens nommés – par une seule fonctionnaire –, et non pas élus, ce qui est scandaleux, poursuit le président du Symev. La majorité d’entre eux ne sont ni juristes ni professionnels du marché et les commissaires-priseurs sont représentés par un seul des leurs, Dominique Ribeyre. Heureusement pour nous autres Français que Sotheby’s et Christie’s en font partie !”
Une grande faiblesse du Conseil, selon Hervé Poulain, est de ne pouvoir représenter la profession des commissaires-priseurs auprès des pouvoirs publics, un rôle que le Syndicat propose de remplir. En jouissant, prétend-il, de “l’adhésion de toute la profession”.
“Le Conseil, ce n’est que la tour de guet sur le pont de rivière Kwaï, une espèce de chambre de discipline qui ne dit pas son nom, proteste-t-il. Or, dès 1997, lorsque la réforme a failli aboutir, nous avions compris qu’elle laisserait un vide juridique, puisqu’il n’y aurait plus de chambre de commissaires-priseurs à Paris ou dans les régions. Moi, je veux créer un label de service qui sera bien utile à la profession.”
Dès sa création, le Syndicat s’est fixé un programme en plusieurs points : promouvoir la profession ; la représenter auprès des pouvoirs publics ainsi qu’auprès des “organismes nationaux et internationaux intervenant sur le marché de l’art” ; “accompagner le Conseil des ventes”, ce qui est vague mais laisse entendre une absence d’antinomie entre les deux organismes ; “apporter des services aux sociétés de ventes” et “promouvoir une politique sociale consensuelle”, des points encore plus flous.
François Curiel, directeur de Christie’s France, est de ceux qui soutiennent la démarche d’Hervé Poulain. “Les syndicats en France ont une vocation particulière pour représenter les branches d’activité et les professions, commente-t-il. Cette représentation s’applique particulièrement en matière sociale mais également auprès des pouvoirs publics et là, je vois un rôle d’accompagnement du Conseil des ventes. Il y a aussi un travail à faire pour améliorer certaines dispositions de la loi, comme les garanties, qui sont inapplicables avec les textes actuels.”
Le Syndicat serait-il également un moyen de pression pour obtenir la poursuite d’une réforme que d’aucuns jugent incomplète et insuffisamment libérale ? Hervé Poulain, en tout cas, ne cache pas son jeu. “La réforme, telle qu’elle a été votée, est une loi de transition. Il faut qu’elle soit améliorée”, déclare-t-il.
Responsable d’accorder l’agrément aux futurs commissaires-priseurs avant, le cas échéant, de les sanctionner en cas de faute, le Conseil des ventes a été prévu par cette même loi que le Symev souhaite maintenant modifier. Son président, Gérard Champin, réagit avec calme. “Le Conseil a l’immense avantage de ne pas être entre les mains de l’État, nous a-t-il déclaré. C’est la première fois que le genre d’agrément que nous accordons est donné par un organisme non-gouvernemental, composé de représentants du secteur économique du pays. Ce qui est un signe très important en direction du marché.” Et le Syndicat ? “Je suis plutôt favorable, poursuit-il. C’est normal qu’il y ait un organisme pour défendre les intérêts des sociétés de vente.”
Quant au désir d’Hervé Poulain de pousser plus loin la réforme du marché, Gérard Champin s’avoue perplexe : “La réforme, il faut l’utiliser telle qu’elle est. Car c’est une bonne réforme.”
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°139 du 21 décembre 2001, avec le titre suivant : Un Syndicat de bon conseil