MAASTRICHT / PAYS-BAS
Une multitude de contraintes extérieures ont amené la foire de Maastricht à écourter la manifestation et à revoir à la baisse son nombre d’exposants, toujours cependant soigneusement sélectionnés.
Maastricht (Pays-Bas). Qui aurait pu imaginer que Tefaf (The European Fine Art Fair) se tiendrait en été, à l’extrême fin du mois de juin ? La foire de Maastricht est ancrée dans le calendrier en mars depuis trois décennies. « Cela fait partie de l’ADN de la Tefaf et nous y reviendrons », témoigne Hidde van Seggelen, le président du comité exécutif de la manifestation. Annulée dans un premier temps en raison de la crise sanitaire – elle devait avoir lieu du 12 au 20 mars –, la foire a finalement été repoussée du 25 au 30 juin. Le temps d’exposition est donc raccourci car il a fallu se caler sur les disponibilités du lieu, le MECC (Maastricht Exhibition & Congress Centre), ce qui a également engendré une réduction de 15 à 20 % de la surface d’exposition des stands et un nouveau plan au sol ; exemple, la section « Œuvres sur papier » n’est plus à l’étage mais au rez-de-chaussée. Cette superficie restreinte et le « conflit » avec d’autres événements programmés à la même époque de l’année ont ainsi contraint les organisateurs à revoir à la baisse le nombre d’exposants. Aussi, pour toutes ces raisons, à laquelle s’ajoute une date un peu tardive pour certains marchands dont les collectionneurs auront déjà fait leur valise, cette édition un peu particulière compte 243 exposants, contre 286 en 2020. Près de 70 galeries ne reviennent pas cette année tandis que 21 sont de nouvelles venues. La section « Showcase » comprend cinq exposants français (les galeries Royal Provenance, Imperial Art, Nicolas Bourriaud, Mendes et Pauline Pavec), lesquels, en tout, sont au nombre de 55 – un chiffre stable ; les anglais, même s’ils restent les plus nombreux, passent de 76 à 59 ; les hollandais sont 22 (contre 38 en 2017, chiffre qui n’a cessé de baisser) quand les américains tombent de 23 à 17.
Comme à l’accoutumée, la foire est découpée en sections : les plus importantes restent celles dévolues aux antiquités et à la peinture ancienne, qui accueillent respectivement 92 et 50 exposants, avec peu de défections, tous les grands marchands ayant répondu présent. Ils sont même rejoints par les galeries parisiennes Steinitz et Sismann. Les autres sections subissent plus de pertes, à l’instar de l’art moderne, qui recense 44 (*) marchands contre 59 en 2020. Une vingtaine ne sont pas revenus, la plupart étant déjà engagés sur Art Basel, qui se déroule une semaine avant, ou ont participé à la version new-yorkaise de Tefaf, qui a eu lieu début mai. C’est le cas notamment des parisiens Almine Rech, Georges-Philippe & Nathalie Vallois, Kamel Mennour, de Landau Fine Art (Montréal) ou de Sprovieri (Londres). Seulement trois nouvelles enseignes intègrent l’art moderne, dont Nathalie Obadia (Paris, Bruxelles), venue avec des œuvres de Martin Barré, Laure Prouvost, Shirley Jaffe et Wang Keping.
Le design est, lui, réduit à peau de chagrin puisqu’ils ne sont que six marchands (dont trois nouveaux : Marcilhac, Marcelpoil et Sèvres) à le représenter, au lieu de vingt il y a deux ans. La raison ? « Il s’agit d’un problème temporaire. Beaucoup de galeries de design s’étaient déjà engagées pour Design Miami/Basel lorsque nous avons annoncé nos dates de juin. Nous espérons qu’en 2023, lorsque nous reviendrons à nos dates de mars, ils exposeront à nouveau », expliquent les organisateurs.
Quoi qu’il en soit, la foire de Maastricht reste la plus grande manifestation au monde en matière d’art et d’antiquités, rassemblant les plus grands marchands, chacun dans leur spécialité. Privés de ce rendez-vous depuis plus de deux ans, ceux-ci ont eu le temps de mettre de côté des chefs-d’œuvre, qu’ils dévoileront le jour J. En voici cependant un aperçu : Xavier Eeckhout (Paris) prévoit d’apporter deux éléphants formant pendant, en bronze, de Rembrandt Bugatti, fondus en 1909 et jamais exposés (autour de 350 000 €) ; la Galerie Chenel (Paris) met à l’honneur une vasque aux anses en forme de lion, sculptée dans un seul bloc de marbre, art romain, IIe siècle apr. J.-C., provenant d’une collection américaine (prix à 7 chiffres) ; David Lévy (Paris, Bruxelles) expose Sans titre (La magie du hasard), 1948, de Picabia (autour de 700 000 €). Maurizio Canesso (Paris) présente pour sa part un Saint André, vers 1650, de Pier Francesco Mola (550 000 €) ; David Aaron (Londres), nouveau venu, montre un sarcophage complet de momie, début de la XXIIe dynastie, 925-875 av. J.-C., Égypte, cartonnage et pigments (autour de 770 000 €) ; la Galleria Continua récemment installée à Paris a sélectionné une œuvre d’Ai Weiwei, Iron Root, 2015 ; Rossi & Rossi (Londres) expose un Bouddha Shakyamuni avec bodhisattvas, en schiste, Gandhara, seconde moitié du IIIe siècle (autour de 860 000 €). Par ailleurs, Colnaghi (Londres) appporte Le Triomphe de Galatée, de Luca Giordano, vers 1675, une huile sur toile redécouverte récemment et dont une version proche est conservée au Musée de l’Hermitage à Lausanne ; Alberto Di Castro (Rome) dévoile une paire de grandes amphores, inédites, à décor historié en faïence, 1670, de Pietro Papi (Urbania, Italie), qui comportent chacune une face monochrome bleue et une face polychrome représentant des scènes de La Jérusalem délivrée illustrée par Antonio Tempesta. Tandis que Franck Prazan met en lumière Pierres no 2 bis, 1932, d’Alberto Magnelli, issue de la série des « Pierres » (1931-1934), une toile proposée au prix de 480 000 euros. « Il s’agit de la plus importante “Pierres” qui me soit passée entre les mains », précise le marchand parisien.
(*) Contrairement à ce que nous avions écrit dans le JdA n°591, le nombre de marchands dans la section moderne est de 44 et non de 4.
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Tefaf, plus resserrée mais riche de promesses
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°591 du 10 juin 2022, avec le titre suivant : Tefaf, plus resserrée mais riche de promesses