Sotheby’s monte en puissance

PARIS - Il en aura fallu du temps pour que Sotheby’s prenne son envol en France. Contrôlée par une direction mondiale américaine qui l’a souvent réduite à un simple bureau d’export d’œuvres d’art sur le prétexte d’une stratégie internationale plus pertinente, ainsi reléguée à la 4e place du classement national des sociétés de ventes volontaires (SVV) en 2005 et 2006, Sotheby’s France monte aujourd’hui en puissance, à commencer par le domaine de l’art contemporain. Pour sa prochaine session, en plus du catalogue habituel du 13 décembre, se tiendra une vente de prestige la vieille au soir. La maison de ventes y introduit un certain nombre d’artistes internationaux qu’elle s’interdisait jusqu’alors de disperser à Paris. Le lot phare est un tableau de Bacon, Seated Woman (1961), venu spécialement de Los Angeles, estimé 7,5 à 10 millions d’euros. « Nous avons aujourd’hui une politique volontariste de mettre en valeur à Paris des œuvres que nous pourrions vendre à Londres ou à New York », avance le président de Sotheby’s France, Guillaume Cerutti (lire p. 21). Son arrivée à la tête de la maison de vente française, il y a trois mois, coïncide avec une stratégie plus offensive de Sotheby’s à Paris. Le tableau de Bacon qui fait la couverture du catalogue, a été exposé à New York et Londres avant sa vente parisienne, et présenté à grand renfort de publicité dans des catalogues de vente du groupe distribués à travers le monde. La vente comprend, par ailleurs, un Love de Robert Indiana dans une rare version rouge, provenant de Suisse, estimé 700 000 à 900 000 euros ; About neon (Obelisk II), une sculpture de 1964 en néon, métal et Plexiglass par Martial Raysse, issue d’une collection hollandaise, estimée 400 000 à 600 000 euros ; de la même provenance, une Bicyclette empaquetée sur galerie de voiture (1962) par Christo, estimée 300 000 euros ; un Paysage de Provence (1953) de Nicolas de Staël, estimé 400 000 à 600 000 euros ; un petit monochrome IKB 288 (1957) et une éponge SE 250 (1959-1960) signés Yves Klein et estimés respectivement 120 000 et 300 000 euros ; ou encore une grande composition de Miquel Barceló, exécutée en 1992 et estimée 300 000 euros. « La moitié de la vente en valeur vient de collectionneurs étrangers qui nous ont accordé leur confiance », souligne Grégoire Billault, directeur à Paris du département d’art contemporain.
Grâce au Bacon, Sotheby’s risque de damer le pion à Christie’s, largement gagnante le 31 mai dernier avec 24,5 millions de recettes grâce notamment à un tableau de Bacon adjugé 6,8 millions (contre un produit de 5,9 millions d’euros chez Sotheby’s). Christie’s organise également pour la première fois à Paris une vente du soir d’art contemporain avec en couverture Mandres de Joan Mitchell, toile du début des années 1960 provenant d’une collection américaine, estimée 1,8 à 2,5 millions d’euros, à côté de Chimp, œuvre de 1983 de Jean-Michel Basquiat estimée 1,5 à 2 millions d’euros et d’une photographie de 2000 de Thomas Struth, Notre-Dame de Paris, estimée 300 000 euros. Les artistes français sont également à l’affiche avec une peinture de 1959 de Pierre Soulages, estimée 750 000 à 950 000 euros, et l’un des plus importants tableaux de Georges Mathieu jamais apparus sur le marché, La Mort de Charles le Téméraire (1957), estimé autour de 300 000 euros. Enfin, toujours en soirée, Christie’s proposera une importante collection française d’œuvres de la Figuration narrative dont le clou est un très grand tableau d’Erró, Comicscape (1971), estimé 300 000 euros.