Vandalisme, pollution, corrosion, craquelures ou lézardes, les outrages subis par les œuvres d’art au fil des siècles sont multiples. La restauration permet de leur redonner une seconde vie. Encore faut-il savoir placer le « curseur » pour ne pas nuire à leur intégrité. De la reconstitution du bras manquant de la Vénus d’Arles à la recréation du château de Pierrefonds, les exemples abondent d’interventions plus ou moins hasardeuses. Les garde-fous, comme le principe de réversibilité, sont nécessaires pour conserver la double polarité esthétique et historique de l’œuvre. C’est l’enjeu du colloque « La beauté réparée », organisé par la Confédération européenne des experts d’art les 10 et 11 janvier à Drouot Montaigne à Paris. Pour l’expert Armelle Baron, ordonnatrice de ces deux journées, le but implicite d’un tel événement est d’obtenir plus de transparence dans les notices de catalogue de vente et les certificats d’expertise.
Raréfaction juteuse
L’impact d’une restauration sur le prix et sur le désir des acheteurs reste sujet à la rareté. « Avec la raréfaction, les gens acceptent aujourd’hui plus facilement une pièce accidentée, indique le marchand Jean-Gabriel Peyre. Les collectionneurs sont plus ouverts sur la restauration d’une faïence, car c’est opaque, alors que dans le cas de la porcelaine, on voit la restauration en transparence. » Bien que la restauration provoque en général une décote, elle peut parfois servir d’argument de vente. C’est en se basant sur la qualité et la complexité d’un long toilettage que Sotheby’s a cédé son autoportrait de Rembrandt pour 6,9 millions de livres sterling (9,6 millions d’euros) au collectionneur Steve Wynn en 2003. Inversement, la maison de ventes a préféré ne pas toucher au Portrait de la comtesse de la Tour Maubourg, au visage pourtant craquelé, adjugé pour 1,1 million d’euros au marchand Richard Feigen pour le Metropolitan Museum of Art de New York.
S’il existe des préceptes généraux, chaque discipline affiche des spécificités. La restauration se décline plutôt sous le régime de la conservation préventive dans le domaine des manuscrits et autographes. « On privilégie le fond sur la forme, explique le marchand Frédéric Castaing. Il y a moins de tentative d’esthétisme, car notre souhait est que l’objet soit transmis aux générations suivantes. »
Gommages historiques
Cette approche très européenne s’observe moins aux États-Unis. Marchands et collectionneurs américains se voient comme les derniers dépositaires d’un objet et non comme un maillon dans la chaîne de transmission. Aussi privilégient-ils les documents blanchis, voire gomment-ils les mentions jugées superflues, bien qu’elles participent à l’histoire du document. La mode et le profil des acheteurs expliquent ainsi le degré de réparation pratiqué par les marchands de mobilier. « Dans les années 1970, les antiquaires vendaient à une clientèle moyen-orientale qui aimait les meubles très vernis et les bronzes redorés. Depuis quinze ans, le goût des gens a changé, remarque le marchand Bill Pallot. Même aux États-Unis, on préfère aujourd’hui un meuble plus dans son jus, on privilégie le cuir d’origine d’un bureau ou d’un fauteuil. » Le dosage d’une restauration en dit finalement long sur la qualité du marchand.
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Restaurations plus transparentes
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°272 du 4 janvier 2008, avec le titre suivant : Restaurations plus transparentes