En préfiguration à l’exposition du Centre Pompidou sur le designer, la galerie Pascal Cuisinier met en lumière ses réalisations de début de carrière, restées plus confidentielles.
PARIS - Depuis 2006, la galerie Pascal Cuisinier défend la génération des premiers designers français, nés entre 1925 et 1930, à l’exemple de Pierre Guariche, Joseph-André Motte, André Monpoix ou encore Pierre Paulin. Elle expose aujourd’hui les premières créations de Paulin dans sa galerie de la rue de Seine. « Je suis spécialisé dans le mobilier français des années 1950. Ce n’est pas mon rôle de vendre des pièces que Paulin a créées pour Artifort dans les années 1960, ni même la gamme “Élysée” éditée dans les années 1970. Les créateurs des années 1950 ne sont pas reconnus à leur juste valeur et je veux les revaloriser », souligne le galeriste. Environ une trentaine de modèles sont présentés, dans une gamme de prix allant de 3 000 à 15 000 euros pour les sièges et jusqu’à 60 000 euros pour les pièces les plus rares et les plus recherchées. Pour réunir cet ensemble, il lui aura fallu sept ans. « J’ai eu beaucoup de chance car certaines pièces ne sont passées qu’une, deux ou trois fois sur le marché depuis dix ans. Il ne fallait pas les rater ! »
Pierre Paulin (1927-2009) est considéré comme l’un des créateurs français les plus ambitieux de sa génération. Avec Guariche ou Motte, il partage une même vision quant aux choix formels et fonctionnels du mobilier d’édition, qui se veut radical et sans compromis. « Il défend l’idée d’un design simple, épuré et rationnel, au service du plus grand nombre et non d’un style esthétique », explique Pascal Cuisinier. Sa conviction intime est celle d’une pertinence de la forme au profit de la fonction de l’objet.
Diplômé de l’école Camondo en 1950, le designer intègre d’emblée le bureau d’études de Marcel Gascoin. À cette époque, il puise son inspiration dans la nature et le mobilier scandinave. Au Salon des arts ménagers de 1953, il expose des meubles en bois multifonctionnels aux formes épurées, ce qui lui vaut en 1954 de devenir designer pour Thonet. En 1955, il travaille avec l’éditeur Meubles TV et présente au Salon de 1955 des meubles aux piétements ronds laqués blanc et assises en cannage de nylon. À la fin des années 1950, il crée pour Thonet des sièges aux housses amovibles à partir d’un tissu révolutionnaire, le « Tessilastic » en Rislan (polymère thermoplastique) tissé en tube – premier fauteuil « chaussette » de Paulin. Le siège devient alors déhoussable, lavable et interchangeable, un argument commercial inédit. « J’ai retrouvé un rouleau de tissu d’époque en jersey qui n’est plus édité depuis cinquante ans et je l’ai utilisé pour l’assise de deux fauteuils de l’exposition », précise Pascal Cuisinier. Les fauteuils en question sont deux chauffeuses CM 194 (édition Thonet, 1959).
Alors que le designer est connu essentiellement pour ses sièges, l’exposition vise à faire découvrir au public son mobilier en bois, ses luminaires ainsi que ses objets en métal. Aussi, parmi les pièces phares de l’exposition, figure un meuble historique, le vaisselier bar VB1, en chêne, demeuré dans un état exceptionnel. « Il s’agit du premier meuble que Pierre Paulin a pu produire grâce à l’aide financière de son père. On ne sait pas s’il existe d’autres meubles de ce type. En tout cas, c’est le premier modèle que nous voyons sur le marché », souligne le galeriste. Le bureau de dame CM 193 (éd. Thonet, 1959) est également une pièce importante car rare. « Contrairement au bureau CM 141 visible chaque semaine sur les brocantes ou en salle des ventes, nous n’avons vu ce modèle que quatre ou cinq fois ces dix dernières années. » Est aussi présentée la Coupe dite « aux nénuphars » en aluminium pour Meuble TV (autour de 50 000 euros) ainsi que la banquette 119 en piétement métal, conçue en 1954 pour le même éditeur.
La galerie a été sollicitée pour prêter 14 pièces au Centre Pompidou qui organise une rétrospective de l’artiste à partir du 11 mai. Pour compléter l’exposition à partir de cette date, Pascal Cuisinier a été contraint de faire un « réassort ». « J’ai rapatrié des pièces que j’ai pu avoir en double et que j’ai vendues par le passé à des clients. Elles viendront se substituer à celles prêtées à Pompidou. » Quatre pièces n’ont pu être remplacées, comme le bureau de dame ou la Table basse 119 (Meuble TV). Des photographies de ces meubles grandeur nature y pourvoieront.
Nombre de pièces : une trentaine
Prix : de 3 000 à 60 000 €
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Paulin en avant-première
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 28 mai, galerie Pascal Cuisinier, 13, rue de Seine, 75016 Paris, www.galeriepascalcuisinier.com
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°455 du 15 avril 2016, avec le titre suivant : Paulin en avant-première