PARIS - Le 16 février à Paris, face à une salle comble, Sotheby’s a dispersé avec succès la collection d’Art nouveau du Garden Museum de Nagoya (Japon), partie pour un total de 5,5 millions d’euros (6,6 millions d’euros frais inclus) contre une estimation haute de 3,5 à 5 millions d’euros.
La vente faisait figure de test sur ce marché. « Les fantastiques résultats obtenus rendent hommage à un courant artistique fascinant que certains croyaient négligé », commente Cécile Verdier, directrice Europe du département Arts décoratifs du XXe siècle. Avant le coup de départ, la maison de ventes a retiré trois lots de la vente ayant fait l’objet d’une offre d’achat privée au profit du Musée des beaux-arts de Reims, acceptée par le vendeur. Un groupe de mécènes champenois a réuni près de 300 000 euros afin que l’institution rémoise acquière la console Soir d’avril au vignoble, la table Herbes potagères et deux chaises issues de la salle à manger d’Émile Gallé réalisée pour Henry Vasnier, directeur des champagnes Pommery. L’argent leur a néanmoins manqué pour acheter le meuble le plus spectaculaire de cet ensemble, le sculptural buffet Les chemins d’automne estimé 500 000 à 700 000 euros. Mis à prix 350 000 euros, le buffet n’a pas trouvé preneur. Seule déception de la vente qui a rapidement fait l’objet de plusieurs offres de rachat. Pour éviter que le piano demi-queue La Mort du cygne (1903) de Louis Majorelle ne subisse le même sort que le buffet de Gallé, Sotheby’s a obtenu du vendeur une baisse significative du prix de réserve. Estimé 500 000 à 700 000 euros, l’instrument a pu être acheté pour 250 000 euros (300 750 euros frais inclus) par un amateur français au téléphone. Estimé 250 000 à 350 000 euros, le bureau Orchidées de Majorelle a été adjugé 270 000 euros (330 750 euros frais inclus) à un couple de collectionneurs européens dans la salle, contre le courtier new-yorkais Lars Rachen. Ce dernier a emporté plusieurs lots dont le Fauteuil de bureau aux nénuphars de Majorelle pour 70 000 euros (84 750 euros avec les frais), au double de son estimation haute. Il a aussi bataillé jusqu’à 165 000 euros (198 750 euros frais inclus) pour décrocher une paire d’appliques de Majorelle, estimée au mieux 20 000 euros. Leurs cache-ampoules réalisés par la maison Daum avaient la particularité d’être en verre dichroïque (changeant de couleur suivant l’angle d’observation), multicouche gravé et martelé. Très vives ont été les enchères pour les œuvres de René Lalique.
L’adjudication la plus élevée de la vente est allée à la sculpture en bronze Femme Ailée figurant en couverture du catalogue. Estimé 200 000 à 300 000 euros, cet élément architectural de la balustrade du stand de Lalique à l’Exposition universelle de 1900 est monté à 1 050 000 euros (1 240 750 euros frais inclus). Il a été acheté par l’homme d’affaires israélien Shaï Bandmann – venu en personne enchérir, et son associé singapourien Ronald Ooi, qui sont les plus gros prêteurs privés du Musée Lalique de Wingen-sur-Moder dans le Bas-Rhin. Ils ont emporté plusieurs autres pièces signées Lalique qu’ils mettront en dépôt à l’institution alsacienne, mais ont renoncé à la Montre de poche à la chauve-souris, en émail et pierre de lune, pièce unique estimée au mieux 200 000 euros qui s’est envolée à 580 000 euros (696 750 euros frais inclus), soit un prix record pour un bijou de Lalique. La vente très internationale a enregistré un taux exceptionnel de 11 % d’acheteurs japonais. Marie-Christine Labourdette, directrice des Musées de France, a préempté à 100 000 euros (120 750 euros frais inclus) pour le compte du Musée d’Orsay, une paire de torchères sur piédestal en grès par Georges Hoentschel qui fut présenté dans le Salon du grès à l’Exposition universelle de Paris en 1900. « Nous avons acquis à de bonnes conditions ces œuvres qui représentent le summum de l’esprit Art nouveau parisien », commente le conservateur Yves Badetz qui, de son côté, a acheté pour 30 000 euros (36 750 euros frais inclus) une coiffeuse et sa chaise d’Eugenio Quarti qui complètent la section italienne du Musée d’Orsay. Jean-Luc Olivié, conservateur en chef du département du Verre au musée parisien des Arts décoratifs, avait repéré quelques pièces en verre de Gallé et Lalique. Mais il est reparti bredouille en raison du niveau des prix. Toutes les verreries de Gallé ont dépassé leurs estimations hautes, à commencer par le Vase parlant de 1900, estimé 80 000 à 120 000 euros, vendu 160 000 euros (192 750 euros frais inclus). L’Américain Allen Michaan, le vendeur de cette collection, a suivi toute la vente. Il s’est déclaré « très satisfait des résultats et ravi que certaines pièces retournent dans les collections françaises ».
Estimation : 3,5 à 5 millions d’euros
Résultats : 5,5 millions d’euros (6,6 millions d’euros avec frais)
Nombre de lots vendus : 119
Taux de vente : 88,8 %
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L’Art nouveau a de nouveau la cote
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°386 du 1 mars 2013, avec le titre suivant : L’Art nouveau a de nouveau la cote