Quatre galeries parisiennes présentent de jeunes artistes très attachés à la peinture ou au numérique.
PARIS - Ainsi va le monde de l’art, qui accorde le bénéfice de la jeunesse pendant bien des années. Selon l’usage assez répandu, sont considérés ici comme jeunes les artistes de moins de quarante ans. Plusieurs de ces jeunes artistes sont actuellement exposés dans quatre galeries du Haut Marais.
Côté rue Chapon, la galerie Zürcher est la plus établie et défend des artistes très reconnus, donc plus âgés, comme Marc Desgrandchamps ou Wang Keping. Cela ne l’empêche pas d’exposer également de jeunes artistes, comme David Lefebvre, 33 ans, présenté en ce moment. Résolument peintre (certains morceaux de paysages évoquent parfois jusqu’à Courbet), l’artiste n’en est pas moins fortement marqué par l’image numérique. Les toiles, figuratives, apparaissent comme en partie gagnées, parasitées par des pixels grossiers qui les envahissent et viennent rompre leur belle harmonie, le noir et blanc se mêlent à la couleur, le tout produisant un sentiment d’étrangeté, de distance froide et même de malaise suggéré par l’intervention de la technologie qui peut, au final, évoquer l’univers de cinéastes comme Alfred Hitchcock ou Brian de Palma.
À côté de la galerie Zürcher, la galerie Sémiose consacre, en dix tableaux, sa seconde exposition à la toute jeune Amélie Bertrand (elle n’a que 27 ans) dans un accrochage qui dialogue parfaitement avec l’exposition précédente. Ici encore sont utilisées les nouvelles technologies de l’image, à l’aide de logiciels tels Photoshop, mais c’est dans le monde numérique même que l’artiste trouve son inspiration. Ainsi, sa peinture, bien que figurative, n’a rien de réel. Les couleurs vives, les larges aplats de couleurs font autant penser à l’univers des premiers jeux vidéos que, dans certaines toiles, au travail du jeune David Hockney.
Camouflage et numérique
De l’autre côté de la rue de Turbigo, la galerie Paris-Beijing expose son artiste sans doute le plus connu du grand public, Liu Bolin, 39 ans, célèbre pour ses mises en scène photographiques dans lesquelles, à l’aide d’un habile travail de camouflage, il se fond dans l’arrière-plan. Comme dans les expositions des deux galeries précédentes, la technologie numérique est questionnée dans le travail de Liu Bolin, puisque c’est par des moyens beaucoup plus rudimentaires, en usant de techniques traditionnelles, qu’il parvient néanmoins à créer ce que le recours à des logiciels très répandus désormais lui permettrait de réaliser à moindre effort. L’exposition se compose de séries d’intérêt inégal. Les œuvres qui mettent en scène l’artiste dans l’espace public chinois – datées de 2007 à 2012 – captivent par la suggestion de l’effacement individuel dans un régime autoritaire et, plus récemment, les poses prises devant les rayonnages surchargés des magasins transposent très intelligemment cet effacement de la personne dans la société et le processus de consommation. Liu Bolin exprime ainsi remarquablement, en termes plastiques, une situation politique et sociale. À l’inverse, les photographies de la série de 2011 « Lost in Fashion » réalisées pour Harper’s Bazaar, dont – exceptionnellement – le sujet n’est plus l’artiste mais de grands couturiers fondus dans leurs créations emblématiques, ne présentent que peu d’intérêt. Ces clichés constituent même un contresens plastique, dans la mesure où l’individualité du couturier est, à l’inverse des contextes précédents, particulièrement exacerbée. On préférera donc se concentrer sur les autres œuvres dont la double dimension plastique et signifiante apparaît autrement plus fascinante. À deux pas de la galerie Paris-Beijing, rue Notre-Dame-de-Nazareth, la Backslash Gallery consacre sa deuxième exposition à l’artiste noir américain Fahamu Pecou, 37 ans. Comme l’artiste précédent, celui-ci se représente toujours lui-même, mais dans des tableaux ou dessins. Réinterprétant des couvertures de magazines liées à l’identité noire, Pecou se peint ou se dessine, en des dominantes de noir et de blanc. Même s’il reprend les codes de la culture urbaine afro-américaine, aucune violence dans son travail, mais de la force et de la détermination. Les dessins, très gestuels, qui semblent réalisés dans l’urgence expriment une belle vitalité.
Nombre d’œuvres : 18
Prix : de 2 000 à 6 500 €
DAVID LEFEBVRE, PICTURE(S)
jusqu’au 23 février 2013, Galerie Zürcher, 56 rue Chapon, 75003 Paris, www.galeriezurcher.com
Nombre d’œuvres : 17
Prix : de 7 000 à 15 000 € selon les formats
LIU BOLIN
jusqu’au 9 mars 2013, Galerie Paris-Beijing, 54 rue du Vertbois, 75003 Paris, www.galerie parisbeijing.com
Nombre d’œuvres : 7 tableaux, 7 dessins, 1 vidéo
Prix : de 2 000 à 13 000 €
FAHAMU PECOU, NEGUS IN PARIS
jusqu’au 23 février 2013, Backslash Gallery, 29 rue Notre-Dame de Nazareth, 73003 Paris, www.backslashgallery.com
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Jeunes artistes dans le Haut Marais
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Abonnez-vous dès 1 €Nombre d’œuvres : 10
Prix : de 2 800 à 7 000 €
AMÉLIE BERTRAND, ROCK AROUND THE BUNKER
jusqu’au 16 février 2013, Galerie Sémiose, 54 rue Chapon, 75003 Paris, www.semiose.com
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°384 du 1 février 2013, avec le titre suivant : Jeunes artistes dans le Haut Marais