La Galerie Alain Margaron expose, pendant la Fiac, une cinquantaine d’œuvres sur toile et sur papier de Jean Hélion (1904-1987).
L’accrochage privilégie les œuvres figuratives des dernières décennies, moins connues et surtout moins comprises que les œuvres abstraites des premières années. « Particulièrement intéressantes, ces œuvres méritent d’être redécouvertes », insiste Alain Margaron qui édite, pour l’occasion, un catalogue dont le texte est signé Henry-Claude Cousseau, bon connaisseur du peintre. Visite chez l’épouse de l’artiste, Jacqueline Hélion.
Jacqueline Hélion : Il n’était pas « complexe » : il était franc, sincère, ce qui l’a souvent desservi, je crois. Ses propos étaient limpides. Quant à l’évolution de son travail, de l’abstraction vers la figuration, elle était pour lui complètement évidente. Ce qu’il ne comprenait pas, au contraire, c’est que les autres ne le comprennent pas.
Il avait gardé des liens avec les artistes américains, qui venaient souvent le voir à Paris [Hélion a vécu aux États-Unis, où il a contribué à faire connaître l’abstraction]. Saul Steinberg était également un ami fidèle qui a fait tout ce qu’il pouvait pour que New York s’intéresse à Hélion. En France, Balthus et Giacometti venaient souvent. Brauner aussi était un ami véritable. Son grand atelier de Bigeonnette était un lieu de rencontres.
Picasso bien sûr, mais aussi Miró et d’autres. Hélion considérait les artistes, tous les artistes, comme faisant partie d’une pyramide : pour lui, si vous retiriez une brique, la pyramide s’effondrait.
Ce n’était pas une volonté de sa part. Quand il est arrivé, avant-guerre, aux États-Unis, seuls Matisse et Picasso comptaient pour les Américains. Hélion, lui, avait déjà commencé l’abstraction en France, et personne ne trouvait cela intéressant… Aujourd’hui, les prix de ces œuvres s’envolent ! Ce fut la même chose lorsque Hélion choisit la figuration en pleine période d’abstraction lyrique. Hélion n’était jamais à l’heure, mais toujours en avance sur son temps.
Hélion lisait énormément. Il lisait toute la nuit, des livres classiques français, anglais et allemands. Il était incroyablement érudit dans ces trois langues. Dans sa peinture, il cherchait un signe qui exprimerait tout, la vie, le monde. de Van Eyck est un tableau qu’il aurait aimé peindre. On lui a reproché d’être un peintre rhétorique : ce n’est pas tout à fait faux.
Probablement, oui. Vous savez, on lui reprochait tout ! Pour lui, il était nécessaire d’aller au Louvre voir la peinture ancienne. On ne voyageait jamais sans s’arrêter dans les grands musées.
Dans la période abstraite d’avant-guerre, son travail était lent ; pas plus d’une dizaine de tableaux par an. Plus tard, la figuration a donné lieu à de nombreuses ébauches, études et compositions différentes. Son catalogue raisonné répertorie aujourd’hui à peu près 2 000 tableaux peints entre 1924 et 1983. - En galerie
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Jacqueline Hélion : « Hélion ne comprenait pas que les autres ne le comprennent pas »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°716 du 1 octobre 2018, avec le titre suivant : "Hélion ne comprenait pas que les autres ne le comprennent pas"