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ENTRETIEN

François Pannier, galeriste et expert en art de l’Himalaya

Commissaire d’exposition, Paris « le marche de l’art himalayen tend a decoller »

Par Armelle Malvoisin · Le Journal des Arts

Le 7 octobre 2010 - 653 mots

Vous êtes le commissaire d’une exposition sur l’art himalayen de la collection Durand-Dessert, en ce moment à Paris (1). Comment s’est organisé cet événement ?
Collectionneurs d’art primitif, les Durand-Dessert ont commencé à acquérir des masques de l’Himalaya il y a une vingtaine d’années. Je les ai régulièrement rencontrés à ma galerie. Après la publication de leur collection africaine en 2008, c’est leur collection himalayenne qui a été publiée sous le titre Himalayas, art and shamans l’année suivante [en anglais, éd. LMDD]. En 2009, l’exposition « Masques de l’Himalaya » que j’ai montée à Martigny en Suisse (2), la première de cette importance dans ce domaine [incluant des prêts du Musée Barbier-Mueller de Genève], leur a donné envie d’exposer leurs pièces. Je leur ai alors proposé de rouvrir leur galerie parisienne d’art contemporain pour l’occasion. 

Comment s’articule l’exposition ?
Porté sur les formes primitives, l’ensemble de la collection Durand-Dessert [une centaine de masques et une cinquantaine de sculptures himalayennes] est remarquable par sa qualité et par sa diversité. Aucune institution française, voire européenne, n’est en mesure de présenter une collection comparable. L’exposition est enrichie de deux masques de la collection de Watteville, exposés précédemment à Martigny. Elle est complétée par des textiles des régions Dolpo et Mustang [nord du Népal] de la collection Rouveure, d’objets d’art shamaniques (dagues d’exorciste, tambours…) de ma collection personnelle, ainsi que de deux séries de photographies de Jean Mansion dont une, Le Tibet, prêtée par le Musée Guimet, à Paris. 

Pourquoi est-il difficile d’établir l’origine géographique des masques ?
Pratiquement tous les masques ont été collectés à Katmandou, au Népal, à partir des années 1950. Centre commercial pour ces objets, Katmandou les a vus transiter sans définir leur origine. Pour cette raison, j’ai réalisé ici un accrochage esthétique et stylistique. Gisèle Krauskopff, du CNRS, dirige des missions afin de collecter le maximum d’informations avant que les traditions culturelles de la région ne se perdent complètement. 

L’art himalayen semble peu connu des collectionneurs d’art tribal…
Il devient de plus en plus connu. Pendant des années, j’ai été tout seul à l’exposer à ma galerie pendant le Parcours des mondes, à Paris [lire les JdA no 330 et 331, septembre 2010]. Cette année, plusieurs professionnels présentaient des masques de l’Himalaya : les galeries Alain Bovis et Renaud Vanuxem [Paris], Dalton Somaré [Milan] et Raquel y Guilhem Montagut [Barcelone]. 

Depuis quand êtes-vous spécialisé en art de l’Himalaya ?
Après de nombreux voyages en Asie, j’ai ouvert ma galerie d’art himalayen à Paris en 1984. À l’époque, j’étais marginal par rapport à mes confrères africanistes. Depuis vingt-cinq ans, j’organise des expositions et rédige des publications sur le sujet. Renaud Vanuxem monte quelques fois des expositions sur l’art himalayen, de même Anna Maria Rossi à Londres. À Paris, Jean-Michel Huguenin [galerie Majestic] présente également des masques himalayens. Mais je reste le seul hyperspécialisé. 

Comment évolue ce marché ?
Ce marché, longtemps resté embryonnaire, tend à décoller. Depuis la vente aux enchères à Paris des collections Goldet (2001) puis Vérité (2006), les collectionneurs se sont rendus à l’évidence : l’art africain est devenu difficilement accessible. Certains ont commencé à se tourner vers l’art de l’Himalaya, une niche de collection beaucoup plus abordable. Pour 30 000 euros, vous pouvez acheter un chef-d’œuvre en galerie. 

Et du côté des ventes publiques ?
Depuis 2008, j’organise une vente annuelle d’objets d’art de l’Himalaya et du Tibet avec la maison Gaïa, spécialisée dans les arts non-occidentaux. Les grandes maisons de ventes, qui ont un département d’art tribal, ne s’y intéressent guère, parce que ces œuvres ne valent pas encore assez cher et que, par conséquent, ce n’est pas suffisamment rentable pour elles. Il faudrait qu’une belle collection passe en vente publique pour créer un électrochoc.

(1) « Masques, arts tribaux et chamaniques de l’Himalaya », jusqu’au 31 janvier 2011, espace Durand-Dessert, 28, rue de Lappe, 75011 Paris, tél. 01 43 38 64 15

(2) Jusqu’à fin décembre 2010

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°332 du 8 octobre 2010, avec le titre suivant : François Pannier, galeriste et expert en art de l’Himalaya

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