PARIS
À l’occasion d’une exposition retraçant l’aventure de ce galeriste d’après guerre, François Laffanour, dépositaire de sa mémoire, pointe la prolifération des faux.
Paris. Alors que la cote des designers promus par le galeriste parisien Steph Simon (1902-1982) ne cesse de monter, le marchand de design François Laffanour, propriétaire depuis vingt ans de ses archives, met en garde : « ll faut arrêter la prolifération des faux. Ceux qui s’y risquent, en se prévalant de cette origine sans en avoir les preuves, s’exposent à des poursuites ou du moins au fait qu’un jour leurs pièces puissent être suspectées de ne pas être authentiques. Je suis le seul propriétaire de la marque. Voilà le propos de cette exposition. »
Après avoir été agent commercial pour l’Aluminium français, Steph Simon, ingénieur des Arts et Métiers, ouvre une galerie au 145, boulevard Saint-Germain en 1956. En véritable pionnier, il va y promouvoir le mobilier moderne en exposant en exclusivité les créations de Jean Prouvé et Charlotte Perriand, mais aussi de Serge Mouille, Georges Jouve, Jean Luce, Serge Ketoff ou encore Isamu Noguchi. L’activité se poursuit jusqu’en 1974, date à laquelle il se sépare de sa boutique et passe la main à l’un de ses anciens employés, Henri Machet. Celui-ci reprend la promotion de designers dans un entrepôt à Montrouge (Hauts-de-Seine), mais l’affaire ne marche pas très bien. « Malade, il m’a alors proposé de racheter la société, ce que j’ai fait en 2001. C’est grâce à cette acquisition que je possède désormais les archives Steph Simon, qui comprennent des factures d’achat, des bons de commande et des plans d’étude d’aménagements intérieurs, raconte François Laffanour. À partir de là, j’ai inversé le processus. Je ne faisais plus la route pour trouver des objets mais je partais des archives pour tenter de sourcer les pièces. »
Depuis, grâce à un travail de promotion mené dans les foires du monde entier et des expositions programmées par les musées, les prix n’ont cessé de grimper – les acheteurs étant à 80 % américains –, avec même une accélération ces dernières années. Dans les années 1950, une Bibliothèque de Charlotte Perriand ne dépassait pas 4 000 francs, quand une Table « Forme libre » coûtait 2 300 francs. « L’équivalent en euros ne veut rien dire aujourd’hui, mais, pour donner un ordre d’idées, en 1968 le smic était à 700 francs. C’était des meubles assez chers », souligne François Laffanour. Au début des années 1990, après un désamour total pour ces créations qui a duré une vingtaine d’années, une bibliothèque de la Maison de la Tunisie ou du Mexique coûtait 30 000 francs (l’équivalent de 25 000 €). « Aujourd’hui, cela vaut 250 000 euros quand une bibliothèque Nuage en vaut 200 000 à 400 000 », précise le marchand. Pour autant, en ventes publiques, la barre des 2 millions d’euros n’a pas encore été franchie, le record allant à une table Trapèze, version longue, de Prouvé adjugée 1,9 million en juin chez Ader à Paris.
L’exposition comporte une vingtaine de pièces emblématiques (entre 15 000 € et au-delà du million d’euros) : une table de forme libre de Perriand, le Bureau Présidence de Prouvé, des luminaires de Noguchi et de Serge Mouille…, dont des modèles présentés lors de l’inauguration de la galerie en 1956 ainsi que des documents d’archives.
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François Laffanour, gardien des archives de Steph Simon
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°597 du 21 octobre 2022, avec le titre suivant : François Laffanour, gardien des archives de Steph Simon